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Les conférences de tous genres jouent un rôle important dans les affaires, la politique, l’exercice des professions libérales et dans la vie privée. Bien des gens échouent dans la réalisation de leurs plans faute d’avoir consulté les intéressés, de s’être enquis de leurs idées et d’avoir éveillé leur attention.

La conférence dont il s’agit ici n’est pas une réunion d’hommes et de femmes qui se rencontrent pour se divertir, mais un groupement de personnes assemblées pour discuter des questions qui les intéressent, pour exprimer des vues et acquérir des idées qu’il sera bon de se rappeler.

Nous vivons dans une société de plus en plus compliquée, où nul ne peut tout savoir dans tous les domaines. La conférence met en contact des gens ayant des opinions différentes et des renseignements variés. L’échange de vues, la mise en commun des idées et l’étude des solutions, voilà les avantages essentiels de la conférence.

Ce mode de discussion a aussi d’autres bons effets. Il permet à ceux qui y ont recours de se mieux connaître, de raffermir leur statut d’associés à une tache commune, de se rendre compte qu’il est beaucoup plus profitable d’employer la persuasion que de chercher à se régenter les uns les autres.

Pourquoi tenir une conférence ?

Avant de décider de tenir une conférence, il faut déterminer quel est le but à atteindre. Il importe d’examiner le problème en fonction des personnes que l’on se propose d’inviter. Ce problème les intéresse-t-il vraiment ? Est-il relié assez étroitement à la place qu’elles occupent dans l’ordre des choses pour que l’on puisse s’attendre à une contribution importante de leur part ?

Si une conférence est convoquée parce que le directeur d’une entreprise, d’une maison d’enseignement ou d’un autre secteur d’activité a un plan ou un programme qu’il désire faire adopter, il exposera ses idées et les soumettra à la discussion du groupe. Dans un autre genre de conférence, un chef voudra peut-être connaître les avis sur une question avant de prendre une décision. Dans ce cas, le chef obtiendra de meilleurs résultats s’il attend qu’il y ait eu une discussion libre et franche avant d’exprimer son opinion personnelle. Mais dans un cas comme dans l’autre, s’il n’y a pas de discussion libre et franche, ce n’est pas une conférence.

Il n’existe pas de formule toute faite pour préparer la conférence que vous projetez : il faut l’organiser selon des modalités particulières en vous inspirant de certains principes généraux.

La première question à se poser est la suivante : « Quel est avant tout le résultat que doit avoir cette conférence ? » Le sujet de la conférence doit comporter un problème, une difficulté reconnue, et se prêter à la discussion. Ce sujet doit avoir de l’importance pour tous ceux que vous invitez à la conférence. Il faut aussi pouvoir attendre des fruits de votre conférence, une issue profitable à vous-même et aux participants. Ce n’est pas une approbation facile de vos idées que vous recherchez, mais une solution fondée sur des principes et les connaissances de vos collègues.

Ne perdez pas de vue la magnifique occasion que vous fournit cette réunion de mettre à contribution les idées créatrices de toutes les personnes qui viennent à votre conférence. Prenez la résolution dès le début de régler votre conférence de façon à en tirer le plus grand parti possible. Si les gens quittent votre conférence avec le sentiment de jouer un rôle vraiment utile dans votre établissement, vous aurez atteint par surcroît un but supérieur, qui aura peut-être plus d’importance pour votre entreprise que tous les autres avantages de la conférence.

Mais qu’il s’agisse des grandes conférences des associations commerciales, des conférences d’une exploitation particulière ou d’une société professionnelle, ou même d’une simple conférence de famille, il importe de se rappeler et d’observer les règles du jeu : le chef peut guider les délibérations, mais il ne doit jamais les dominer ; la discussion ne doit pas s’écarter de la question, et il faut en bannir les remarques blessantes ou discourtoises.

La préparation

Le succès ou l’échec d’une entreprise dépend de sa préparation. Les hommes qui occupent des postes de commande ont soin d’organiser leurs projets jusque dans les détails. Ils prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer la réalisation de leurs fins.

Si vous négligez de préparer votre conférence de bonne heure et avec l’application voulue, elle pourra s’engager dans des voies étrangères au sujet et aboutir à la confusion plutôt qu’à l’accord désiré.

En préparant votre conférence, vous devez établir s’il s’agira d’une réunion non dirigée, où l’on expose un problème que l’assemblée discute ensuite au hasard, ou d’une conférence dirigée, où l’on cherche à épargner du temps et des efforts en maintenant la discussion dans la bonne voie.

Le moment venu de préparer votre conférence, vous pourrez utilement lire certaines parties du premier volume des procès-verbaux et délibérations de la Conférence d’étude de S.A.R. le duc d’Édimbourg (Oxford University Press). Ce livre nous montre comment cette conférence des mieux réussies fut organisée et menée à bonne fin.

L’étude de ce compte rendu, ajoutée à votre expérience dans d’autres domaines, vous convaincra qu’il est dangereux de penser que les choses vont s’arranger si on les laisse suivre leur cours. Cela s’applique d’une façon spéciale à la conférence, où des gens aux connaissances variées et aux dispositions d’esprit différentes sont mis en contact. La préparation est ici indispensable au succès, car elle permet à la conférence de régler les choses le mieux possible, dans le plus bref délai et avec le minimum de complications.

Mais n’allez pas rendre votre conférence d’une rigidité cadavérique en la préparant jusque dans les moindres détails. L’excès d’organisation finit souvent par étouffer une entreprise. De plus, cela pourra vous causer des ennuis personnels, car une opération ordonnée avec trop de précision est toujours plus exposée à faire fiasco si quelque chose va de travers.

La conduite de la conférence

Il y a une différence entre la conduite d’une conférence et le fait d’en assurer la direction. Le premier agent exécutif d’une compagnie, d’une association ou d’un groupement peut fort bien préparer et organiser la conférence, et mener toute l’affaire jusqu’à la clôture de la réunion, mais confier la direction ou la présidence de la conférence à une personne qu’il choisit à cause de ses aptitudes spéciales à l’exercer une telle fonction.

Il faut que quelqu’un soit placé à la tête de ceux qui préparent la conférence. Si vous acceptez cette charge, vous aurez besoin d’assistants, peut-être même de comités, mais c’est vous qui répondrez du succès ou de l’échec de l’entreprise.

S’il s’agit d’une grande conférence, le comité de direction devra peut-être s’adjoindre d’autres comités : un comité de réception pour adresser les invitations, faciliter le transport des membres et les accueillir à leur arrivée ; un comité du programme pour établir les horaires, retenir une salle, faire installer les accessoires nécessaires, tels que tableaux, projecteurs, etc.

Ne permettez pas à vos comités de bâcler leurs travaux de préparation. Ne laissez personne supposer que quelqu’un d’autre s’occupe de telle ou telle chose.

L’un de vos comités devra savoir exploiter le principe, bien connu des éducateurs et des vendeurs, selon lequel le meilleur moyen de communication des idées est celui qui s’adresse à deux au moins des cinq sens. Si le sujet de votre conférence est susceptible d’être illustré par des graphiques, des films fixes ou cinématographiques, des photos ou des dessins, faites en sorte que votre comité vous en procure. Les auxiliaires visuels doivent remplir trois conditions : titre faciles à comprendre ; être précis ; titre appropriés.

Le fichier aux idées

Il serait bon ici de commencer à vous constituer un fichier aux idées. Tout ce qu’il vous faut pour cela, c’est une boîte comme celle dont on se sert pour classer les recettes, avec des guides et des fiches de 3″ x 5″ pour noter vos idées. Inscrivez sur vos guides les diverses rubriques de vos préparatifs : auxiliaires visuels, places, photos, conférenciers, invitations, etc. Vous pouvez établir vos premières fiches en parcourant le présent Bulletin mensuel, puis chaque fois qu’une idée vous vient à l’esprit la coucher sur le papier et la mettre dans votre fichier. Lorsque arrivera le moment d’aborder l’organisation détaillée de votre conférence, vous aurez une mine d’idées, qui rendra votre travail relativement facile et contribuera à assurer le succès de votre tâche.

L’une des rubriques les plus importantes de votre fichier s’intitulera : « emploi du temps ». C’est là un élément qui reviendra dans toutes les phases de la préparation. Il faut un bon jugement pour établir un programme où remploi du temps n’est pas trop rigide pour permettre d’accomplir du bon travail sans pourtant être élastique au point de faire languir la conférence. Il est bon de laisser de la marge afin de pouvoir profiter des occasions qui se présentent, tout en parant aux éventualités qui peuvent survenir quand des participants se lancent dans des discussions hors de propos.

Il ne faut pas s’en tenir rigoureusement au premier projet tracé. Apportez des modifications jusqu’à ce que vous puissiez vous féliciter intérieurement du résultat. Mais prenez-vous-y d’avance afin d’avoir suffisamment de temps à votre disposition. Vous ne devez pas compromettre le succès de la conférence en imposant des changements à la dernière minute.

Voici les points à relever lors de la vérification finale : le sujet est-il à propos et bien présenté ? a-t-on bien choisi ceux qui fournissent la matière du sujet ? les groupes d’étude ont-ils de bons chefs ? les conférenciers sont-ils à la hauteur ? tous ces points s’accordent-ils dans l’ensemble ? le plan général conviendra-t-il aux personnes qui assisteront à la réunion ou est-il surchargé de détails techniques, de visées idéalistes, de points tendancieux, etc. ?

Convocations et documentation

Vos avis de convocation doivent susciter l’intérêt et donner à vos invités un but à atteindre. Ces avis doivent formuler le dessein de la conférence de façon à obtenir une réponse favorable : « oui », cela s’impose ; « oui », je puis collaborer.

Exposez le but de la conférence et dites pourquoi il intéressera les invités. Ne mettez pas ces derniers à la gêne. Il ne s’agit pas ici d’une séance de propagande pas plus que d’un événement mondain. C’est une réunion pour discuter de problèmes connus et tracer des plans en commun. Faites comprendre aux invités combien précieuse sera leur collaboration.

Insistez sur le fait que l’invitation ne cache aucun piège. Pas de ruse dans vos motifs, mais un désir sincère de connaître ce que chacun peut offrir.

Dès que les invitations sont parties, vous ne pouvez revenir sur vos pas. Il faut à tout prix que vos démarches soient couronnées de succès. Ne perdez pas de vue vos comités ; tenez tous les membres au courant des faits nouveaux et de la marche de l’affaire.

Pour la réussite de la discussion, il convient de fournir assez longtemps d’avance de la documentation à vos invités. Cela permettra aux participants de venir à la conférence sur un pied d’égalité et de parler en connaissance de cause. La documentation doit tendre à renseigner et non pas à faire accepter les idées de quelqu’un. On n’exprimera d’opinions personnelles que lorsque viendra le moment de la discussion.

L’un de vos comités sera chargé d’aménager un local près de la salle de conférence, où tous les participants pourront obtenir les renseignements désirés. La bibliothèque de votre compagnie ou de votre établissement pourra rassembler un vaste choix de publications traitant du sujet à discuter. Votre bibliothécaire peut emprunter ailleurs ce qui est nécessaire pour compléter votre collection.

Le choix du président

Le président est la cheville ouvrière de la conférence. C’est lui qui la mènera au succès ou à l’échec. Il est donc d’intérêt capital qu’il soit choisi pour son habileté et ses connaissances.

Résumons les principales qualités requises. Un président doit diriger la discussion avec calme ; présenter le sujet assez clairement pour que les participants puissent en parler de façon intelligente ; suivre attentivement la discussion et la ramener dans la bonne voie avec bienveillance ; récapituler les délibérations aux moments opportuns.

Quand vous songez à un bon président de conférence, les qualités suivantes vous viennent à l’esprit : intelligence brillante, sens très fin de l’humour, largeur d’esprit, curiosité, vivacité, patience, intégrité et impartialité.

Ajoutons à tout cela une certaine modestie, car un président qui prétend tout savoir peut tout gâter. Il est le modérateur d’un groupe de gens qui ont droit à leurs idées et qui doivent exprimer librement leurs opinions.

Le président doit être au courant du sujet. Trop de gens qui n’oseraient parler en public sans une préparation soignée, veulent prendre part à une discussion sans avoir, au préalable, tous les renseignements nécessaires, et sans avoir étudié la question. Il ne faut pas s’attendre à ce que le président en sache plus long que l’ensemble des participants, mais il lui faut au moins connaître les rudiments du sujet à débattre et pouvoir suivre le fil de la discussion avec discernement.

Il serait bon que le président trace les grandes lignes de ce qu’il peut considérer comme ses attributions. Par exemple, suivre avec vigilance la tendance de la pensée des participants ainsi que sa portée ; saisir et prendre note des énoncés utiles, soit pour le moment, soit pour plus tard ; interrompre toute discussion qui s’éloigne du sujet ; la ranimer si elle languit ; attirer l’attention sur divers aspects du problème ; inciter les participants à trouver une solution, quand c’est possible.

Le président doit être versé dans l’art de relier les idées décousues ou disparates pour former un tout. Il évitera de se mettre en vedette en faisant trop souvent des résumés, mais il devra rallumer l’ardeur quand c’est nécessaire. Il ne voudra sûrement pas que sa conférence dégénère en concours d’éloquence pour le simple plaisir d’entendre les gens parler. Il fera germer les idées et les avivera.

Dès le début, la tâche du président est de maintenir les esprits ouverts et en activité, de lutter contre la distraction et l’apathie. Il doit savoir empêcher les participants de se former en petits groupes. Cependant, il pourra, à son gré, constituer des groupes qui étudieront les points qui leur auront été soumis.

Le choix des participants

Quelles sont les personnes que vous inviterez à la conférence ? Avant d’arrêter votre choix, demandez-vous quelles sont celles qui contribueront le plus à son succès.

Il vous faut des gens d’expérience, à l’esprit vif, prêts à faire des recherches sur le sujet de la discussion, puis à pousser à la roue selon leurs connaissances.

Les participants seront choisis en raison de leur disposition à bien s’entendre entre eux et avec le président ; à prendre part à la discussion sans préjugés, en respectant l’opinion des autres ; à mettre leurs connaissances au service de tous ; à écouter courtoisement les débats sans interrompre ceux qui parlent ; à ne pas prendre trop de temps pour exposer leurs idées de prédilection.

Les participants se feront un point d’honneur d’étudier les publications mises à leur disposition afin de prendre part aux débats de façon sérieuse et intelligente.

En préparant votre liste d’invités, tenez compte de la diversité des esprits. Vous envoyez la même formule d’invitation et les mêmes publications à une dizaine, une cinquantaine ou une centaine d’invités, mais il n’y en aura pas deux qui interpréteront de la même manière les faits ou les théories. Chaque invité apportera quelque chose de personnel, d’après sa propre expérience. Voilà justement ce qu’il vous faut : des opinions différentes.

Un point sur lequel vous reviendrez souvent, avant et pendant la conférence, c’est la nécessité de communiquer ses idées. Ce n’est pas tout de les exprimer ; il faut qu’elles pénètrent dans l’esprit des auditeurs et qu’elles y produisent de l’effet.

La conférence elle-même

Vous connaîtrez des moments d’anxiété à mesure qu’approchera le jour de la mise à exécution de vos plans. Ayant terminé votre travail d’organisation, vous devez vous en remettre aux participants. S’appliqueront-ils à la tâche ?

Le présent Bulletin mensuel traite des préparatifs d’une conférence sans indiquer la manière de la mener à bonne fin. Mais si, depuis le début, vous avez activé le travail, éveillé et retenu l’attention ; si vous avez choisi un président qui ne faillira pas à sa mission, il ne vous reste plus grand-chose à faire pour assurer le succès de la conférence elle-même.

À l’ouverture de la conférence, votre allocution devra faire ressortir le but de la réunion, engager les gens à oublier leurs occupations de tous les jours pour se lancer dans un travail d’importance. Il n’y a pas de place, ici, pour les anecdotes et les envolées oratoires ; soyez simple, sincère et clair.

Dès la première séance, il faut inspirer confiance aux participants, les aider à sortir de leur milieu habituel, leur communiquer l’enthousiasme qu’on éprouve à mener quelque chose à bien.

Pendant toute la durée de la conférence, vous devrez demander au président et à ses assistants de vous rendre compte de la marche des délibérations ; peut-être serez-vous appelé à intervenir de nouveau, à repréciser le but de la réunion, à ramener les participants à la réalité.

Très probablement, c’est vous qui devrez, à la fin de la conférence, remercier les participants pour le travail accompli et les bons résultats obtenus.

Après la conférence

Au cours du résumé des débats, efforcez-vous de tirer de la multitude des idées et des impressions quelques principes bien définis et de les formuler avec clarté.

La conférence ne devra pas se terminer par de vagues recommandations. Persuadez les gens qu’il importe de faire quelque chose. Si les participants estiment qu’il faut plus d’enseignement, plus d’études techniques, plus de renseignements, demandez-leur de préciser la nature et les fins de cet enseignement, de ces études et de ces renseignements. Exigez plus de détails. À qui peut-on demander ce travail supplémentaire ? Qui en prendra la direction ? Dites-leur que vous organiserez un service de renseignements pour ceux qui voudront étudier la question plus à fond.

La fin de la conférence pourra ainsi amener les premières améliorations utiles, si vous poursuivez vos efforts avec autant d’énergie que vous en avez consacré à l’organisation de la réunion.

Vous pouvez, une semaine plus tard, envoyer un court résumé des points sur lesquels on était d’accord. Cela ranimera l’enthousiasme.

Puis, au cours du mois, adressez un rapport complet à chaque participant ; pas un rapport mot à mot de la discussion, ce qui serait ennuyeux, mais un rapport embrassant loyalement tous les points de vue. Dans une lettre jointe au rapport, invitez les membres à vous faire part de leurs nouvelles idées ou de leurs opinions après plus ample réflexion, en précisant bien qu’il s’agit non pas de ressasser les délibérations, mais de les compléter.

Avant de poster le rapport final, relisez-le attentivement afin de vous rendre compte s’il est clair et précis, s’il contient un appel à l’action.

Une conférence qui commence, se poursuit et se termine de la façon indiquée ci-dessus ne peut être qu’une expérience fructueuse pour l’organisateur comme pour les participants.