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Être canadien ce n’est pas être citoyen d’un pays quelconque. Le Canada retarde peut-être dans certains domaines ; il y existe des différends sur les questions de langues, d’économie et de gouvernement ; mais les bases du pays sont solides, et ses multiples credo tendent tous, par leur sommet, vers le même idéal.

Il y a quelque chose de dynamique et de remarquable à la fois dans le fait d’être citoyen canadien. Comme le disait J.B. Brebner, au cours de l’allocution qu’il prononçait en 1940 à titre de président de la Société historique du Canada : « Le canadianisme est formé de plus de trois siècles de lutte victorieuse avec un milieu récalcitrant, de plus d’un siècle d’adaptation et d’imagination fructueuses et fécondes en politique, et d’une espèce de conservatisme que l’adversité peut transformer, comme l’histoire le démontre, en une volonté obstinée et indomptable. »

Nous avons réuni, au Canada, la hardiesse et l’esprit d’aventure de plusieurs races dans un milieu des plus propices à la création d’une grande nationalité. Elles ont apporté avec elles des idées vivaces et des principes vieux de mille ans. Jamais fondateur de pays ne pouvait rêver de conditions plus favorables que celles que lui offraient tous ces gens prêts à mettre leurs dons et leurs talents au service d’une entreprise unique en son genre : l’édification de la nation canadienne.

L’année du centenaire nous fournit l’occasion de mobiliser nos imaginations et nos institutions dans un vigoureux effort national pour tenter de mieux connaître en quoi consiste le véritable civisme et surtout de le pratiquer davantage. Cette tâche exigera certes du dévouement, de l’énergie et du temps de la part de tous les citoyens et les groupes bien pensants, mais nous ne devons pas la remettre à plus tard, sinon ce pourrait être le commencement de la fin de notre manière de vivre.

Le Canada est encore en train de se bâtir. Et les Canadiens y travaillent activement. Ils n’ont même jamais cessé de le faire, à l’ouest comme au nord, depuis le jour où Louis Hébert laboura sa première parcelle de terre à l’ombre de Port Royal, en 1604. Aujourd’hui, nous participons même à l’exploration de l’espace. Le Canada a été le troisième pays à mettre un satellite en orbite autour de la terre.

Notre pays n’est pas non plus demeuré inactif dans le domaine des idées. Il est maintenant une nation dotée d’une identité culturelle, politique et sociale qui lui est propre, et non pas une simple colonie composée d’aventuriers français et anglais, unis seulement par le désir de gagner leur vie. Le premier gouvernement du Canada, formé de ministres de langue française et de langue anglaise, proclamait déjà dans le discours du trône de la première session de la première législature qu’une « nouvelle nationalité » était née. C’est depuis ce moment que nous sommes libres de réaliser nos plus hautes possibilités en tant que citoyens d’un État national démocratique.

Mais ayant acquis notre souveraineté comme nation, nous devons maintenant apprendre à nous comporter d’une manière intelligente comme citoyens.

Immensité du territoire

Il est malheureux que nous nous préoccupions tellement de notre diversité, alors que c’est précisément cette diversité qui confère son individualité au Canada. De la pluralité des talents et des laçons de voir naissent l’originalité, la force et l’esprit de progression. C’est de notre héritage commun que nous sont venus nos libertés fondamentales, notre mode de vie démocratique, nos arts, notre littérature et notre musique. Et ce qui est le plus important de tout, l’esprit d’entreprise, de découverte et de colonisation que nous ont légué nos ancêtres.

Les Canadiens ont toujours encouragé les nouveaux venus à se joindre à eux et à partager leur vie dans les vastes espaces de leur territoire. Au Canada, chaque homme et chaque femme peut trouver dans la société une place en rapport avec ses goûts et ses talents. C’est un pays où le citoyen ordinaire, si humble soit-il, a des chances de pouvoir améliorer son sort. Mais il doit d’abord accepter l’esprit de nos institutions. C’est même à l’observance de l’esprit des lois et des coutumes qui règlent nos vies que se reconnaît la valeur de notre citoyenneté.

Dans un État démocratique comme le Canada, le droit de vote est un privilège inestimable qui découle de la citoyenneté. Notre mode de gouvernement n’oblige pas tout le monde à voter, mais la démocratie pourrait bien tomber en discrédit si ceux qui bénéficient de ses droits et de ses prérogatives négligent de les exercer. Aux élections générales de 1965, 74.3 p. 100 seulement des électeurs inscrits ont déposé leurs bulletins.

Mais le devoir du citoyen ne se borne pas à voter. On ne peut pas voter pour la démocratie, puis rentrer chez soi et n’y plus penser. Il faut que chaque citoyen vive la démocratie afin de créer l’ambiance morale et spirituelle dans laquelle le gouvernement doit fonctionner. Il importe que les représentants élus du peuple soient appuyés, secondés et parfois aiguillonnés par l’opinion publique si l’on veut qu’ils établissent les conditions requises pour permettre aux hommes et aux femmes de notre population de satisfaire leurs aspirations et réaliser leur bonheur.

Ce que signifie la citoyenneté

Le canadianisme bien compris implique l’adhésion à une collectivité quelconque. Le citoyen n’est pas uniquement un individu ; il appartient à une famille, à un village ou une ville, à une province, à la nation et même à l’univers.

Être citoyen, c’est plus que posséder des connaissances techniques sur le gouvernement du pays. Cela suppose que l’on a un idéal, le sens des valeurs et une idée de ce que peut devenir la vie au Canada. Cela embrasse tout le domaine de la pensée, du savoir et du comportement.

Le citoyen ne se contente pas d’être un visage anonyme dans la foule, une quantité inconnue de ses collègues, un numéro sur la feuille de paie, un locataire quelconque pour son propriétaire, un membre inactif d’un syndicat, d’une paroisse, d’une association professionnelle ou d’anciens élèves.

Surtout, le bon citoyen n’est pas un parasite. Il ne considère pas la nation comme une très riche coopérative commerciale dans laquelle tous les citoyens ont droit à leur part. Le citoyen judicieux sait distinguer entre la sécurité, qui le ravale au rang d’un enfant à qui il faut tout assurer, et la stabilité qui ne donne rien pour rien, mais veille à ce que l’effort reçoive sa récompense. Le citoyen doit être droit et fier ; réfractaire à toute théorie susceptible de miner le principe de la responsabilité et de la dignité personnelles.

Ce qui importe pour devenir bon citoyen, que l’on soit Canadien de naissance ou que l’on vienne d’un autre pays, ce n’est pas d’étudier les sciences politiques, mais d’acquérir de la maturité. Et cela exige deux conditions : être sensément maître de soi et se comporter en être sociable.

Le bon citoyen développe ses talents pour son plus grand bien et celui de la société. Le Canada ne vise nullement à l’uniformisation des esprits, ce qui ne pourrait aboutir qu’à la pire banalité. Il désire au contraire, chez ses citoyens, la collaboration, la bienveillance et la souplesse devant les changements que commande une appréciation intelligente de la situation.

Démocratie et liberté

Le civisme est une vertu importante pour ceux qui estiment que la démocratie mérite mieux et plus que quelques applaudissements lors de nos réunions patriotiques. Les citoyens d’un pays démocratique sont des hommes libres et droits qui se font gloire de se gouverner eux-mêmes et qui se gouvernent effectivement.

La démocratie est un état d’esprit, et non une loi. Elle assure les conditions ambiantes qui permettent aux citoyens ordinaires de mettre en valeur leurs dons extraordinaires. D’où l’extrême importance de l’effort personnel pour faire progresser la démocratie et la maintenir dans la bonne voie.

La démocratie du Canada est la démocratie d’une société en transformation. Elle n’est pas emprisonnée dans une constitution rigide qui aurait fixé pour toujours l’étendue et les limites de la liberté dont jouiront les citoyens.

D’autres pays ont opté pour le changement, avec des résultats regrettables dans certains cas. Ils ont cru que le mieux pour eux était de s’en remettre corps et âme à l’absolutisme du contrôle politique. S’ils y ont trouvé un soulagement temporaire à certains de leurs maux et le gage illusoire de leur sécurité future, ils ont en revanche perdu leur liberté démocratique et sacrifié l’espoir de réaliser ce à quoi les disposaient leurs qualités individuelles. D’autres encore en sont venus à penser, avec une arrogance insolente, que la « liberté » suppose le droit pour chacun de faire ce qu’il veut.

La démocratie est une chose qui s’apprend ; elle ne s’acquiert ni par don, ni par droit, ni par conquête. On se renseigne sur elle en étudiant ou en travaillant avec des gens qui font ou qui disent des choses auxquelles nous ne sommes pas habitués, ou encore en prêtant une oreille sympathique aux gens qui mettent en doute certaines de nos hypothèses. Sans l’échange des idées, l’espèce humaine serait encore plongée dans les ténèbres des premiers âges.

La démocratie présuppose le droit pour toute minorité même s’il ne s’agit que d’une seule personne, de différer d’opinion avec la majorité. Ainsi que l’écrit George Brown, dans un livre publié en 1947, « quoi que soit la démocratie, ce n’est pas le gouvernement par la force brutale, mais par la persuasion. C’est le sens de la loyauté, de la justice, de l’esprit sportif dans l’acception la plus haute de l’expression.

La démocratie comporte certaines libertés : libertés de parole, de discussion, de réunion, de la presse, de métier, de propriété, de domicile, de déplacement, de religion, d’opinion, d’association, et le privilège de ne pas être arrêté injustement.

Nous savons que nous sommes libres, quand les conditions le permettent, de faire le plus grand usage possible de nos moyens en tant qu’individus et de réaliser notre plein épanouissement matériel, intellectuel et spirituel.

Il faudrait avoir soin de préciser dans nos déclarations des droits de l’homme que ces documents n’ont pas pour but d’énoncer ce que les humains aimeraient avoir, ni ce qu’ils peuvent arriver à avoir, ni ce que l’État estime pouvoir sans danger leur accorder, mais ce que les hommes doivent posséder pour accomplir pleinement et librement leur métier d’être humain.

La seule sauvegarde de ces droits est la conscience qu’en ont les citoyens et leur détermination de les conserver, non seulement pour eux-mêmes mais pour toute la population. Nous acceptons tacitement de perdre un peu de notre liberté chaque fois que nous gardons le silence devant une injustice quelconque.

Nombreux rôles à jouer

Le citoyen a plusieurs rôles à jouer sur la scène de la nation.

Il doit être un bon voisin. En tant que membre de la collectivité, il aura de la considération pour les sentiments et les besoins des autres. Il appuiera ses organisations publiques et aura pour les gens des autres religions ou des autres races les mêmes égards que ceux qu’il s’attend à recevoir de leur part. Il réservera une partie de son temps et de ses efforts pour aider ses voisins à rendre la vie plus agréable dans sa localité. Il prendra une part active aux initiatives collectives destinées à améliorer le fonctionnement de l’administration de sa municipalité.

Le bon citoyen connaît les problèmes importants auxquels doivent faire face ses représentants au sein du conseil municipal et du gouvernement provincial ou fédéral. Ces problèmes, il en parle et il les étudie, afin de pouvoir voter en connaissance de cause le moment venu. C’est là un devoir inéluctable, car une démocratie est forte dans la mesure où son corps électoral est bien renseigné.

Dans la famille, le citoyen enseignera à ses enfants à distinguer entre ce qui est bien et ce qui est mal, et il leur apprendra à préférer ce qui est bien. Il montrera à ses fils et à ses filles à s’accorder avec les autres, il les encouragera à faire de bonnes études et il les habituera à accepter de plus en plus la responsabilité de leurs actes à mesure qu’ils acquièrent de la maturité. Le citoyen d’élite ajoute à l’amitié qui règne dans sa famille le complément de la compréhension. Il guide et dirige ; il compatit aux hauts et aux bas de la vie des adolescents ; il crée un terrain propice où les jeunes peuvent pousser de solides racines. Gouvernés par des principes, ses enfants ont peu de chance de se laisser entraîner hors du droit chemin par des caprices dégradants.

Le sens des responsabilités

Il est évident, par conséquent, que devenir citoyen du Canada ce n’est pas simplement obtenir le privilège d’être inscrit sur le rôle de l’impôt. Le civisme consiste essentiellement dans l’acceptation des responsabilités, et chaque citoyen est tenu de faire de son mieux pour pourvoir non seulement à ses besoins et à ceux de sa famille, mais aussi à ceux de la société.

La citoyenneté n’est pas l’affaire des esprits passifs. L’homme solitaire, qui se contente de regarder passer le défilé, tout en faisant des conjectures, en critiquant et en pensant que l’on pourrait faire beaucoup mieux, n’est pas un citoyen, car la citoyenneté suppose à la fois participation, intervention et contribution. Personne ne peut avoir l’impression d’être utile dans la vie s’il se retranche dans l’isolement.

Il incombe en premier lieu au citoyen de faire ce que l’on attend des hommes de bien, puis de faire ensuite ce que sa position particulière dans le monde exige de lui et le met à même d’accomplir. Cinq siècles avant notre ère, le grand homme d’État athénien Périclès ne disait-il pas : « Ne permettons pas à nos affaires personnelles de nous absorber au point que cela nuise à notre action dans la cité. »

Le sens des valeurs

S’il ne veut pas se voir livré à la merci des colporteurs professionnels de fausses idées, le citoyen devra se former un sens aigu et sûr des valeurs.

Les Canadiens ont atteint le haut rang qu’ils occupent aujourd’hui parmi les peuples du monde en apprenant à discerner la véritable qualité des idées et des choses. Aux gens qui prônent de nouveaux moyens ou de nouveaux régimes, ils répondent non pas que la démocratie a été mise à l’épreuve et qu’elle ne s’est pas révélée à la hauteur, mais qu’elle a été mise à l’épreuve et qu’elle s’est révélée difficile. Les nouvelles méthodes ne passent pas pour meilleures, mais pour plus faciles.

Il serait vraiment déplorable que les Canadiens se laissent induire par cet argument spécieux à rejeter ce que leurs ancêtres – et eux-mêmes – ont édifié au prix de tant de peine. Comme le disait Churchill, à la Chambre des communes, en 1945 : « Très souvent le jacassement des perroquets empêche d’entendre la voix des aigles. »

Nos esprits ne sont que trop enclins à se laisser déconcerter par le tumulte des idées et des opinions, et à penser plutôt à ce qui sépare les hommes qu’à ce qui les unit. Le hargneux grignotement des institutions de la démocratie par des gens munis, non pas de marteaux pour bâtir, mais de torches pour incendier, est issu d’une longue lignée de destructeurs. Les Hittites, mentionnés par la Genèse comme une puissante nation, n’ont laissé derrière eux que la réputation d’avoir détruit une multitude de choses que d’autres peuples avaient mis tous leurs soins à construire.

Certains de ceux qui critiquent le canadianisme sont des anarchistes, des gens qui prétendent croire au droit pour tout homme de faire ce qu’il veut. Les uns sont des patriotards ou des nationalistes farouches ; d’autres, des individus hostiles et agressifs, qui témoignent de la même espèce d’immaturité que l’enfant qui hurle quand ça ne va pas à son goût.

Mais il y a chez les Canadiens un fonds de bon sens et de bonne volonté qui empêchera les fomentateurs de troubles d’accomplir leur oeuvre. L’opinion publique – et chaque citoyen est responsable jusqu’à un certain point de l’orientation de l’opinion publique – doit, dans son propre intérêt, être intelligente, éclairée et constructive.

Apprendre ensemble

Les gens qui ont dans la vie des convictions inébranlables sur toutes les questions imaginables mènent une existence plutôt triste. Ils ignorent tout le plaisir de la recherche, toute l’exaltation de la discussion et toute la joie de la découverte.

C’est raisonner en enfant que de croire que la vie sera toujours belle, embaumée et conforme à nos désirs. Le médecin doit étudier les maladies pour favoriser la santé ; le musicien doit connaître la dissonance pour créer de l’harmonie ; le citoyen doit rechercher ce qu’il y a de douloureux et de discordant dans la société pour rendre la nation florissante et harmonieuse.

Que les gens ne soient pas tous d’accord sur certains points, cela est naturel, mais il serait déplorable que ces désaccords soient dus à l’ignorance ou à l’indifférence. Voilà pourquoi la direction de la citoyenneté du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration a pour mission d’aider tous les Canadiens à mieux comprendre les privilèges et les devoirs du civisme. Ce service, dont les nombreuses publications sont en vente chez l’Imprimeur de la Reine, à Ottawa, et dans les diverses librairies du gouvernement, encourage les organismes et les associations à participer à des programmes d’action visant à favoriser la bonne entente et la collaboration entre les groupes ethniques.

Le Conseil du civisme, établi à Ottawa et financé dans une proportion de 95 p. 100 par des entreprises commerciales, ainsi que par des particuliers et certaines sociétés bénévoles, a été fondé en 1940 en vue d’encourager la diffusion des connaissances sur la citoyenneté et la démocratie.

Regard sur les anciennes valeurs

Ce qu’il y a de plus essentiel dans le civisme, ce sont ses valeurs, ses aspirations, ses obligations morales, ses attaches profondes, sa conception de la vie bien vécue et de la perfection, son appréciation du succès, ses enseignements sur les principes pour lesquels et selon lesquels les hommes doivent s’efforcer de vivre.

Mais le moment semble venu, pour les Canadiens, de revoir certains de leurs anciens principes et de leurs anciennes valeurs, et peut-être de se servir du marteau, du ciseau et du papier de verre pour les débarrasser de la croûte de poussière qui les recouvre. Le ravalement d’une église de Londres n’a-t-il pas permis de remettre au jour les larmes sculptées sur les joues d’un chérubin ! Que de choses sur l’art de l’époque, les sentiments du sculpteur, les usages du passé ce simple détail a pu révéler aux Londoniens.

Les coutumes, les principes et les valeurs propres au Canada ne sont parvenus à leur forme actuelle qu’après plusieurs siècles d’adaptation aux exigences du milieu géographique et aux nécessités de la vie. Si nous nous détachons de nos principes de vie, comment pourrons-nous survivre ?

L’avenir de notre mode de vie canadien serait bien précaire si nous venions seulement à manquer de fidélité aux principes qui lui servent de base. Être infidèle, ce n’est pas nécessairement se révolter ou recourir à la violence. Cela peut consister à faire preuve de ce que l’on appelle de l’« incivisme », c’est-à-dire être infidèle à l’esprit de la vie canadienne en négligeant ses devoirs de citoyen. Les vertus de la société occidentale sont le fruit de l’éducation et de la discipline, et elles ont besoin d’être appuyées et cultivées avec constance et fidélité.

Le sens de l’orientation

Le civisme donne une orientation à la vie. Loin de nous faire envisager les événements avec pessimisme ou par leurs mauvais côtés, d’y voir une espèce de « Götterdämmerung » – crépuscule des dieux où le gel et la neige régneront sur la terre – notre civisme doit plutôt nous inciter à aimer, tout en travaillant à sa réalisation, le plus parfait des régimes sociaux offerts jusqu’ici à des citoyens désireux de chercher ensemble le meilleur genre de vie possible. C’est le moment de regarder le chemin parcouru et de nous rendre compte que notre civisme a plus de sens et de valeur que jamais auparavant.

Il se trouvera naturellement quelqu’un pour dire que tout cela est de l’idéal, mais que la réalité n’est pas aussi simple. Et pourtant, la pratique du civisme pourrait être assez simple, en somme, si les Canadiens voulaient le considérer non pas comme une notion juridique ou abstraite, mais comme un devoir qui transcende la loi et la raison, un sentiment profond, une ferme conviction, qui domine toute notre vie.

L’existence du Canada est liée à celle de chacun de ses citoyens en particulier, et la participation active de chaque individu sur le plan civique profite à la nation tout entière. Le véritable citoyen est celui qui tient la tête haute afin de pouvoir regarder assez loin devant lui pour avoir une vaste vue d’ensemble de l’intérêt général du pays. C’est de cet intérêt que dépend le sien propre.