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Le vingtième anniversaire de la Déclaration des droits de l’homme, adoptée par l’O.N.U. le l0 décembre 1948, sera marqué par une réaffirmation de cet idéal commun proposé aux peuples de l’univers.

Au Canada, l’initiative des manifestations a été prise par le Conseil canadien du civisme, qui déclarait en 1964 : « La défense des droits de l’homme doit être l’objectif fondamental des citoyens du Canada. »

Sous l’impulsion du Conseil du civisme, une commission nationale a été créée sous le nom de Commission canadienne de l’Année internationale des droits de l’homme. Des commissions provinciales ont organisé des réunions et des groupes d’étude ; les universités apporteront leur contribution particulière : l’Université McGill s’est donné pour but d’établir un Centre d’étude des droits de l’homme ; les écoles ont prévu des programmes analogues à ceux qui furent exécutés à l’occasion de l’année du Centenaire, et la Conférence internationale sur la sécurité sociale a choisi pour thème : « Les droits de l’homme et la sécurité sociale ».

L’idée d’asseoir les droits de l’homme sur une base solide découle du principe relativement simple que chacun, sans distinction de race ou de pays d’origine, a droit à certaines prérogatives comme être humain.

Les concessions, si libérales qu’elles puissent paraître, ne sont pas des droits. Les droits sont ce qui revient à l’homme, et non pas ce que la société est disposée à lui accorder. Ils appartiennent à l’homme en tant qu’homme. Ils sont plus forts que la politique ou toute autre invention de la société.

La liste de nos droits en tant que Canadiens – qu’ils dérivent de la loi ou de la coutume – pourrait remplir plusieurs pages. Personne dans l’histoire n’a joui d’une plus grande liberté que celle que nous connaissons actuellement.

Nous avons le droit de choisir notre religion et de la pratiquer ; le droit d’appartenir au parti politique de notre choix,- ou d’organiser de nouveaux partis ; le droit d’avoir nos opinions et de dire ce que nous pensons ; le droit de réunion et d’association.

Ce sont là des droits essentiels dans une société pluraliste comme le Canada, une société qui compte et protège plusieurs religions, plusieurs philosophies, plusieurs groupes ethniques et plusieurs citoyens de types différents.

Cette année, la commémoration de la première tentative dans l’histoire d’étendre l’application des droits de l’homme à toute l’humanité offre l’occasion aux Canadiens de mesurer leurs propres succès. Il existe chez l’homme une tendance malheureuse qui consiste à cesser de se préoccuper d’une chose dès qu’elle ne semble plus douteuse. Au milieu des transformations rapides qui caractérisent notre époque, il est nécessaire de penser non seulement aux nouveaux droits exigés par les changements intérieurs et extérieurs, mais aussi, ce qui est très important, de ne pas perdre de vue la conservation des anciens droits qui ont fait leurs preuves.

Droits et libertés civils

On confond parfois les « droits civils » et les « libertés civiles ». Les premiers désignent généralement les droits privés entre les individus ; c’est le cas, par exemple, de « la propriété et des droits civils » que l’Acte de l’Amérique du Nord britannique place sous l’autorité des provinces. Les secondes sont un terme générique qui s’applique aux droits publics, comme la liberté de religion, de parole, de presse, etc.

Le Canada a, entre autres choses, reçu en héritage un respect profond et fondamental pour les droits civils, qui sont enracinés dans les précédents juridiques et protégés par les tribunaux.

Les libertés civiles tirent leur origine des protestations formulées par des groupes de citoyens contre ce qu’ils considéraient comme le despotisme réel ou éventuel de l’État. Elles ont leur source dans l’idée que l’État existe pour le bien de l’individu plutôt que l’individu pour le bien de l’État.

Les droits de l’homme

Au delà de l’aspect négatif des droits, qui se limiteraient à la protection de l’individu contre la violation de sa liberté personnelle, il existe une conception plus positive du rôle de la société, selon laquelle celle-ci a le devoir de créer de nouvelles possibilités d’épanouissement personnel pour les citoyens, d’encourager la recherche scientifique destinée à favoriser le bien-être de l’homme, de généraliser l’instruction, d’établir un haut niveau de prospérité matérielle et d’utiliser les ressources nationales à l’avantage de tous. Ces choses sont considérées comme des droits de l’homme, corroborés par un appel au sens moral de l’humanité.

Nous considérons beaucoup de droits comme tout naturels, sans y prêter attention si personne n’en entrave l’exercice. C’est pourquoi il est important et rassurant d’avoir des codes de droits écrits, même si tous les droits ne peuvent être réunis dans une déclaration si complète soit-elle. Il s’agit là de valeurs, de buts et d’idéaux que l’on trouve dans les traditions et dans la conscience collective des peuples.

Les droits écrits eux-mêmes ne sont pas tous d’égale valeur. Une « déclaration de droits » énonce des principes, mais n’est pas une loi. Lorsque la déclaration devient une loi du Parlement ou d’une législature, elle acquiert une existence indépendante. C’est un document dont on peut en appeler en droit et non seulement l’expression d’un voeu.

Les lois concernant les droits ont besoin d’être révisées périodiquement, parce que les libertés changent et revêtent de nouveaux aspects. Elles doivent être des énonciations de valeurs et éviter les précisions trop rigoureuses, qui pourraient en réalité limiter la liberté du fait même que l’on tente de la définir.

Une déclaration de droits doit plaider pour ceux qui sont sans statut, sans pouvoir et souvent sans voix. Pour le faire effectivement, elle doit être plus qu’une affirmation solennelle des convictions démocratiques ; elle doit comporter des sanctions. Une déclaration sans sanctions peut être pire encore que l’absence de toute déclaration. La nature humaine étant ce qu’elle est, certaines personnes refuseront de reconnaître les droits de l’homme si elles ne sont pas forcées de le faire.

Une déclaration de droits doit également tenir compte de la possibilité que les droits soient violés de façon indirecte. Un règlement municipal interdisant la distribution de tracts sans autorisation soumet la liberté de parole et de presse à la censure de la police. Le refus par un journal d’annoncer la tenue d’une réunion politique porte atteinte aux droits du citoyen de choisir librement son gouvernement.

Au Canada, la plupart des droits fondamentaux sont protégés par la loi ou la coutume ; c’est leur application et leur mise en vigueur qui laissent à désirer. Pour remédier à la situation, on a proposé de recourir à des protecteurs du peuple, afin de faire échec à l’arbitraire administratif et à l’inégalité de traitement. Quelques provinces ont adopté cette idée, dans l’espoir manifeste que les citoyens seraient égaux non seulement devant la loi mais aussi devant l’administration.

Pour les individus comme pour les collectivités, la seule sauvegarde des droits de l’homme est une opinion publique saine et vigilante, jointe à la détermination de mettre en oeuvre les convictions que professent les citoyens. Aucun droit n’est automatique ou assuré pour toujours ; c’est pourquoi l’intelligence ne doit jamais s’assoupir. Que nous le voulions ou non, nous avons tous intérêt à lutter pour la protection des droits de l’homme.

Liberté et droits

Le mot « liberté » intervient constamment chaque fois qu’il est question des droits de l’homme.

Il est tout simplement inexact, comme voudraient nous le faire croire les extrémistes, qu’il n’y a pas de milieu entre l’exercice déréglé et téméraire de la licence individuelle et la camisole de force de la soumission absolue sans aucune latitude pour l’exercice du jugement responsable.

Nous avons la liberté de nous mouvoir dans une orbite aussi vaste mais aussi limitée dans son ampleur que ce qui est compatible avec la conservation de l’harmonie générale des rapports sur lesquels se fondent la vie et la survivance véritables.

Notre bruyant amour de la liberté procède presque entièrement de notre aversion pour la contrainte. Aux yeux de l’esclave, la liberté consiste tout simplement dans l’affranchissement de ses liens. Pour certains, la liberté signifie uniquement le fait d’échapper à quelque chose : la prison, un régime politique, un milieu désagréable. Il importe de nous demander quelle est notre idée dominante. Dans le contexte des droits de l’homme, celle-ci ne devrait pas se borner au désir d’avoir la liberté de faire ce que nous désirons, mais être la conviction qu’aucun être humain ne devrait être forcé de faire ce qui va à l’encontre de sa volonté ou de ses principes.

Nous sommes responsables individuellement de l’usage que nous faisons de notre liberté et de la liberté que nous accordons aux autres ; nous avons également la responsabilité, dans une collectivité civilisée, d’éviter que les autres soient lésés, et nous sommes comptables de cette responsabilité envers la société.

L’histoire nous enseigne que nous n’arriverons jamais à la perfection dans le domaine des droits de l’homme, pas plus d’ailleurs que nous ne parviendrons à atteindre le bien parfait, car, abstraction faite de la fragilité de notre nature, à mesure que nous progressons, nous acquérons une vue plus vaste des responsabilités humaines et une plus haute idée du bien.

Au milieu de la complexité croissante de la vie moderne, les droits exigent une attention vigilante. Les jeunes gens, c’est-à-dire ceux qui appartiennent à la génération qui a fait ses études secondaires ou universitaires pendant les années 60, ont droit d’être entendus et les adultes ont le devoir d’écouter. Les personnes qui ont grandi à côté des machines électroniques et des ordinateurs ont des idées nouvelles sur leur rôle et peut-être aussi sur l’importance, la valeur et la nature des droits de l’homme.

Droits et démocratie

On ne trouve dans l’histoire aucun exemple d’un gouvernement qui ait respecté les droits des hommes sans être organisé et dirigé d’une manière démocratique. La démocratie a réalisé la synthèse des lois et des libertés naturelles, et elle est en voie de démontrer sa capacité de faire face à des conditions changeantes.

Les principes observés en démocratie comprennent, d’une façon générale, les idéaux de dignité de la vie humaine. On en trouve la liste suivante dans une publication sur le civisme :

Tous les êtres humains ont une valeur absolue sans distinction de race, de religion ou de biens matériels ;

La raison et la conscience sont les guides essentiels du comportement humain ;

Les êtres humains sont fondamentalement égaux, et leur égalité doit être respectée ;

La liberté, qui a pour seules limites la responsabilité morale et la justice sociale, doit être assurée à tous les êtres humains.

Les droits de l’homme ne sont pas sans soulever certains problèmes, mais c’est le propre de la démocratie de triompher de la complexité. Ses citoyens doivent avoir la force intérieure de même que l’instruction, les habitudes et le courage nécessaires pour faire fonctionner le régime. Son patriotisme s’exprime sous forme de participation à la vie collective de la nation.

La clef du bon fonctionnement de la démocratie réside dans son profond respect pour la personnalité humaine, accordé de façon impartiale à tous les membres de la société. Ce sentiment tire une grande partie de sa force des religions qui affirment la sainteté de l’individu et la fraternité des hommes. Il vit dans le coeur des hommes, et s’il y meurt, aucune constitution, aucune loi, aucune déclaration ne peut le sauver.

Il existe des raisons fort valables d’accepter les différences qui existent entre les gens ainsi qu’entre leurs idées et leurs convictions, car il est humainement impossible de connaître le tout de toutes choses. L’intolérance raciale et religieuse a toujours été odieuse et destructrice, mais elle se révèle singulièrement obstructive dans un monde qui essaie de faire face à des événements et à des changements qui devraient rapprocher les gens dans un esprit d’entraide et de protection mutuelle.

Droits des minorités

L’une des plus grandes difficultés qui s’opposent à la mise en pratique des droits de l’homme provient de la situation particulière des minorités religieuses, ethniques, linguistiques et autres.

Ce qui importe dans l’application des dispositions des droits de l’homme, c’est qu’en plus du principe de la prépondérance de la majorité, il convient que chaque groupe de la société reconnaisse la légitimité des intérêts des groupes minoritaires, à condition, comme le dit Sydney Hook, que « le groupe en question accepte les méthodes du libre examen et de la décision démocratique comme principes de règlement des conflits d’intérêt. »

Les majorités doivent être généreuses et bienveillantes. Elles s’exposent à gâcher ce qu’il y a de bon en elles, si tout en admettant qu’il faut toutes sortes de gens pour faire un monde, elles l’affirment comme si elles jugeaient la chose regrettable. Par contre, les minorités doivent prendre garde que leur insistance à revendiquer certains droits ne devienne à la longue un marteau dont les coups répétés finiront par détruire l’affection.

La cause fondamentale des conflits de groupes ou de classes est l’attitude de supériorité qu’adoptent les groupes ou les classes les uns à l’égard des autres. Il est essentiel que les minorités soient encouragées à participer à la vie commune de la collectivité, quelles que soient les coutumes et les cultures qu’elles désirent conserver chez elles, et qu’elles reçoivent un chaleureux accueil de la majorité. Rien n’est plus morne et plus déprimant que d’être enfermé en soi-même ; rien n’est plus vivifiant et réconfortant que d’orienter son attention et ses efforts vers l’extérieur.

Nous devons laisser libre champ, dans notre démocratie, à ce qui est individuellement unique en son genre chez nos divers groupes ethniques, nous rappelant sans mauvais vouloir que ce qui est un animal de boucherie pour les uns est une vache sacrée pour les autres.

La responsabilité démocratique

Le fait de réfléchir sur les droits de l’homme devrait amener les citoyens à acquérir un sens plus aigu de leurs responsabilités humaines. On ne peut s’attendre à voir surgir des activités désintéressées, des idées larges et des vues claires chez ceux qui mettent normalement leur confort personnel au-dessus des exigences de leur milieu. Pour jouir des droits de l’homme, il faut les mériter en se souciant profondément des droits des autres.

Les beaux discours ne suffiront pas pour remplir les obligations que nous impose l’Année internationale des droits de l’homme. Il faudra des actes et de la persévérance. Le moment est venu de prendre position, de lever la tête, de se faire entendre, d’exercer de l’influence, d’accomplir des efforts, en un mot d’agir. Comme l’écrivait William C. Hankinson, président du Conseil canadien du civisme de Prince-Rupert : « Faites ce qu’il faut faire. Rendez service là où l’on en a besoin. Finissez-en avec les évasions chimériques dans les nuages. Il se perd beaucoup trop de temps alors que de brûlants problèmes de civisme se posent partout autour de nous. »

La vérité est que l’on peut causer du mal aux autres, non seulement par ses actions, mais par son inaction, et chacun en est responsable avec juste raison dans les deux cas. Le devoir est une foi commune et collective, et tout l’homme est tenu de faire honneur à son contrat avec la démocratie.

Le grand précepte de la charité était la règle de vie de l’Esquimau de l’âge de pierre, et cette règle est encore la meilleure qu’aient trouvée les démocraties les plus évoluées pour régir les rapports sociaux. Elle s’applique à tout individu, qu’il soit riche ou pauvre, qu’il soit d’accord ou non avec nous, quelle que soit sa race ou la couleur de sa peau. Dans le monde nouveau qui est en train de naître, c’est là non seulement un devoir moral, mais une condition indispensable de survie.

L’exemple des Nations Unies

La Charte des Nations Unies, qui a été élaborée à San Francisco en 1945, est l’une des plus grandes réalisations de l’humanité. Il n’aurait jamais été possible d’y arriver, si les Nations, grandes ou petites, n’avaient pas été disposées à renoncer à une partie de leur prestige et de leur intérêt national en faveur de l’intérêt supérieur de la communauté mondiale. On retrouve à chaque page de cette charte des concessions implicites de la part de l’un ou l’autre des cinquante pays qui l’ont établie.

Ces « peuples des Nations Unies », comme le dit le préambule de la Charte, étaient alors les mandataires de l’humanité résolue à édifier une manière de vivre ordonnée et pacifique. Ils se sont engagés à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l’Organisation, en vue de favoriser le « respect effectif et universel des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

Il était naturel, dans ces conditions, qu’en 1948 l’Assemblée générale des Nations Unies codifiât et proclamât une Déclaration universelle des droits de l’homme.

Cette Déclaration est sans caractère obligatoire. Elle s’appuie sur la conscience en éveil des peuples de la terre. Pourtant, elle annonce une ère nouvelle dans l’histoire de l’humanité. Elle nous encourage à vivre conformément à des principes universellement proclamés et universellement nécessaires.

Des Nations Unies, l’initiative est passée à chaque nation en particulier. Même s’il existait déjà dans les provinces du Canada un grand nombre de dispositions législatives pour la sauvegarde des droits individuels, ce n’est qu’en 1960 qu’une Déclaration fédérale proclamait dans un document unique la foi de notre pays dans la dignité essentielle et ainsi que dans les droits égaux et inaliénables et dans les libertés fondamentales de tous.

La Déclaration des droits, adoptée à l’unanimité par la Chambre des communes, affirme en substance, au nom du Canada, ce que renferme la Déclaration des Nations Unies, mais elle ne nous donne pas la liberté de nous endormir. Elle ne protège pas nos droits pour toujours. Des lois ultérieures pourraient nous dépouiller des libertés déclarées ; les législatures provinciales ont certains pouvoirs dans les domaines en cause, et la Déclaration canadienne ne vaut que dans le domaine fédéral ; les lois édictées avant son adoption demeurent applicables.

En plus de rechercher l’uniformité dans les lois qui garantissent la jouissance des droits de l’homme dans les provinces et sur le plan fédéral, le Canada doit en assurer l’application. Sa tâche n’est pas encore terminée non plus dans le domaine même des droits de l’homme. Certains besoins ont été énoncés par un comité de la Conférence préliminaire sur les droits de l’homme, en vue de leur étude au cours de cette Année anniversaire. Ce sont, entre autres, l’accès égal et effectif à l’instruction pour les enfants comme les adultes ; les rapports entre le bien-être économique et les droits et la dignité des personnes ; l’égalité de l’homme et de la femme ; la création de dispositifs efficaces pour assurer l’étude, la prévention et le redressement des inégalités dans l’administration de la justice ; la généralisation des lois relatives aux droits de l’homme et de leurs modes d’application dans le Canada tout entier ; la pleine participation des Indiens à la vie politique, économique et sociale de notre société.

Plusieurs questions mentionnées dans la Déclaration universelle ne figurent pas dans la Déclaration canadienne : la protection sociale des enfants ; le droit au travail et à la protection contre le chômage, à un salaire égal pour un travail égal dans des conditions équitables et satisfaisantes ; le droit au repos et aux loisirs, et « le droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille ».

Les problèmes du Canada

Les problèmes qui se posent aujourd’hui au Canada en matière de droits de l’homme sont certes difficiles, mais ils ne sont pas tant un fardeau qu’une invitation à poursuivre la tâche.

Il s’agit de se mettre à l’oeuvre. Une Française à laquelle on racontait le miracle de saint Denis, premier évêque de Paris, qui, après avoir été décapité, franchit une distance de huit kilomètres en portant sa tête dans ses mains, fit cette observation : « La distance est sans importance ; c’est le premier pas qui compte ».

Les nations du monde ont, il y a 20 ans, reconnu le fait que tout être humain a droit aux moyens qui lui sont nécessaires pour réaliser son épanouissement dans les conditions les plus propres à assurer le plus grand bien de la communauté dont il est membre.

Il reste maintenant à donner suite aux principes qui ont été énoncés. Dans l’intervalle, nous devons nous accommoder d’une situation quelque peu vague et litigieuse, où les vertus elles-mêmes baignent encore dans une espèce de demi-jour. Nous ne doutons pas de leur valeur, mais nous hésitons à faire le nécessaire pour les mettre en pratique.

L’anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme fera peut-être luire, comme il faut l’espérer, la lumière dans les ténèbres autour de laquelle l’opinion publique se ralliera pour obliger les législatures et les gouvernements à prendre les mesures voulues pour rendre ces droits obligatoires. On ne pourra alors méconnaître qu’à ses risques et périls cette expression de la conscience collective du monde.