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Pourquoi est-il tellement plus agréable de se battre pour la liberté que de la posséder ? Pourquoi est-il si passionnant de lutter pour obtenir l’émancipation et si monotone d’en faire l’expérience ? Pourquoi l’homme éprouve-t-il de la fierté lorsqu’il milite pour acquérir une liberté et se sent-il un peu ridicule quand il parle de cette liberté par la suite ?

Ce n’est pas ainsi qu’il faut envisager la conquête de la liberté. Instaurer la liberté, ce n’est qu’un début, une porte que l’on ouvre. Ce premier effort ne sert à rien s’il ne débouche pas sur quelque chose qui mérite d’être précieusement conservé, utilisé et mis à profit.

Notre civilisation est la première dans l’histoire qui ne soit pas basée sur le travail des esclaves. C’est là assurément un immense progrès, non seulement sur le plan moral, mais aussi à cause de l’action favorable que ce fait devait avoir sur notre dignité et notre bien-être. Dans ses souvenirs d’Afrique, le Dr Albert Schweitzer raconte cette anecdote : un jour, dit-il, une femme de condition aisée se présenta à mon hôpital, accompagnée de quatre esclaves. L’ayant aperçue le lendemain en train de ramasser du bois, je lui demandai pourquoi elle devait porter elle-même son bois de chauffage, vu qu’elle avait quatre esclaves. « Celui qui a des esclaves, répondit-elle, n’est pas nécessairement bien servi. » En affranchissant les esclaves, nous nous sommes libérés nous-mêmes de la nécessité d’avoir des esclaves : compter sur ses propres efforts, c’est se perfectionner et être vraiment libre.

Au stade où est actuellement parvenue la vingt et unième des grandes civilisations que le monde ait connues, la liste de nos libertés pourrait remplir plusieurs pages. Chaque fois que nous disons ouvertement et à haute voix ce qui nous plaît ou ce qui nous déplaît, chaque fois que nous choisissons un livre de lecture, chaque fois que nous changeons d’emploi, chaque fois que nous assistons à un office religieux, chaque fois que nous réglons notre récepteur de radio ou de télévision sur la station de notre choix, chaque fois que nous assistons à une réunion politique, chaque fois que nous nous levons au cours d’une réunion de parents et maîtres pour exprimer notre opinion, nous faisons quelque chose que l’on ne peut accomplir que dans un pays libre.

Tout cela semble si normal que nous ne nous rendons même pas compte combien la moindre parcelle de ces libertés nous manquerait si nous venions à en être privés. Nous n’avons pas encore vraiment appris à jouir dans toute leur plénitude des avantages dont nous disposons, avantages qui sont l’issue d’un combat aussi ancien que l’histoire de l’homme.

Pour tirer le meilleur parti possible de nos libertés, nous devons nous appliquer tous ensemble à devenir des citoyens intelligents, cultivés et éclairés, au fait des valeurs, des privilèges et des devoirs de notre manière de vivre canadienne.

Certaines personnes dépassent la mesure. Elles ne font pas de distinction entre la liberté et la licence. La liberté exige un certain empire sur soi-même, par lequel la raison met un frein aux impulsions et aux passions, et subordonne à une liberté supérieure notre droit de ne faire que ce qui nous plaît.

La souveraineté de la loi

La souveraineté de la loi est un idéal élevé, où l’autorité a pour source la volonté des citoyens. La liberté n’est pas la possibilité pour chacun de faire ce qui lui plaît sans se soumettre à aucune loi. C’est le privilège qu’a l’homme de s’imposer une règle stable, commune à tous les membres de la société. Il s’agit d’une liberté à l’intérieur de certaines limites plutôt que d’une liberté complètement anarchique. Elle accepte la répression de certaines tendances instinctives ou barbares afin de permettre à l’esprit humain de bénéficier d’une liberté plus grande et plus vaste.

Voici ce que disait de la loi l’un de nos grands orateurs, Me Leonard W. Brockington : « La loi, dans sa majesté et sa véritable grandeur, ne prend jamais pour l’oppression, la violence ou la mauvaise foi. Dans son acception la plus noble, elle se tient avec compassion aux côtés de « L’Homme à la houe », dans la cellule du persécuté et près du bûcher du martyr. Elle est présente partout où un homme marche la tête haute et dit la vérité qu’il porte en lui. On la trouve partout où les grands esprits et les grandes âmes combattent le fanatisme et l’obscurité. Car la Loi est la voix de la liberté et des hommes libres. »

La souveraineté de la loi suppose qu’il y a une seule et même loi pour tous les hommes, que tous sont égaux devant elle et que personne n’est puni s’il ne l’a pas transgressée. Elle concilie l’ordre social avec la liberté et l’initiative individuelles. C’est pour nous la garantie que le gouvernement n’est pas au-dessus de la loi et qu’il respecte l’indépendance des tribunaux et les sauvegardes des libertés du citoyen. Seul le Parlement peut modifier la loi, et le Parlement, c’est le peuple.

Le bon gouvernement

La liberté repose sur le bon gouvernement. Au Canada, la démocratie est limitée du fait qu’elle est constitutionnelle et représentative, ce qui tend à empêcher l’exercice de la tyrannie. Parmi les constitutions des divers pays du monde, celle du Canada se classe par son ancienneté au huitième rang des constitutions écrites, au deuxième rang des constitutions de caractère fédéral et au premier rang de celles qui allient le fédéralisme aux principes du gouvernement responsable.

Notre constitution nous offre les moyens de rectifier les erreurs par la loi et non par la force ; elle nous assure le droit d’élire des représentants au scrutin secret et de n’être assujettis à l’impôt que par nos représentants élus. Le régime canadien autorise la libre expression des plaintes, exige qu’elles soient étudiées à fond et en prévoit le redressement expéditif. Toute minorité, si petite soit-elle, a le droit de rejeter les propositions de la majorité et même de s’y opposer en vertu de la loi. Il est tenu comme établi, d’autre part, qu’une fois les décisions adoptées par voie de libre choix, à la suite d’un débat raisonnable, tous les citoyens s’y soumettront.

Une condition essentielle de la liberté est la participation des gouvernés à l’élaboration des mesures nécessaires à leur bien-être. Ils le feront en utilisant leur droit de vote, ce qui est un signe de vitalité dans une société libre.

Le devoir de voter oblige à se renseigner pour bien voter, et chacun doit s’appliquer à bien comprendre notre mode de gouvernement. La démocratie n’est pas une formule magique qui permet de tirer de sages décisions de l’ignorance aveugle.

Jamais, semble-t-il, ne fut écrit plus beau plaidoyer en faveur de la liberté que celui de John Stuart Mill, en 1859, mais il comporte une mise en garde : « Il se peut, dit le grand économiste anglais, qu’un peuple opte pour le gouvernement libre, mais, si par indolence, négligence, lâcheté ou manque de patriotisme, ce peuple est incapable d’accomplir les efforts nécessaires pour le conserver… il est peu probable qu’il en jouisse bien longtemps. »

La civilisation dans laquelle nous vivons aujourd’hui est matériellement la plus dangereuse que l’homme ait jamais imaginée pour lui-même. On assiste, dans tous les pays, au drame angoissant de la transformation des vues et des conceptions. Beaucoup de choses sont réévaluées au nom de la nouveauté et du modernisme. La contrainte de la tradition a perdu sa force ; elle est remplacée par la contrainte de l’agitation. Un esprit de non-conformisme règne partout dans le monde. Ses adeptes se méfient des chefs et de ceux qui réussissent. Ils répondent avec empressement aux sollicitations des rénovateurs, le plus souvent avec plus d’enthousiasme que de lucidité.

Pour conserver sa liberté et en jouir dans de telles conditions, il est nécessaire de bien comprendre la différence qui existe entre la réflexion et l’opinion de la foule.

S’ils veulent obvier aux circonstances qui sont la cause du malaise général, les gouvernements doivent prévoir et adopter les réformes exigées par les profonds changements sociaux dont nous sommes témoins. Mais pour que l’action entreprise dans ce sens par les gouvernements soit efficace, il faut que les citoyens participent activement à la tâche de choisir et d’éclairer ceux qu’ils élisent pour gouverner.

C’est, en dernière analyse, le peuple – le peuple tout entier – qui décide de quelles libertés il entend jouir. Même à la dernière extrémité, en temps de guerre, le peuple doit, par l’entremise de ses représentants au Parlement, donner son consentement aux restrictions imposées à sa liberté.

Les libertés qu’il faut posséder

La plus importante des libertés est celle de l’esprit. Une démocratie ne peut subsister et permettre à ses citoyens de trouver le bonheur que si ces derniers jouissent de la liberté de douter et de contester.

Mais, comme le disait si bien quelqu’un, la liberté de penser n’est utile que si l’on sait se servir de sa tête. Penser c’est comparer les choses entre elles, en noter les ressemblances et les différences. C’est le contre-pied de l’attitude indolente de ceux qui approuvent le code des valeurs de leur groupe sans les confronter avec d’autres vues.

La liberté de penser, au sens véritable du mot, comprend la liberté de parole. Le Canada a lié son avenir au principe que la conciliation des opinions, sur le marché libre des idées, est, de toutes les méthodes connues de l’homme, celle qui offre la meilleure chance de voir triompher la vérité.

Le droit à la discussion est reconnu à tous les citoyens du Canada. Si un homme est mécontent du gouvernement, il lui est permis de se lever et de le dire. Il peut exprimer librement et ouvertement ses opinions sur toutes questions d’intérêt public, sans craindre les représailles ou l’intervention de la police, des fonctionnaires ou de qui que ce soit.

Il est possible qu’un homme parle à tort et à travers ; pourtant si on lui refuse le droit de le faire, on le prive de sa liberté. Mais il ne faut pas confondre la liberté de parole avec la liberté de crier. Il n’est pas permis d’empêcher les autres de se faire entendre au nom de la liberté de parole.

Les journaux et les autres moyens d’information ont, comme tout citoyen, le droit d’exprimer leurs opinions sur les questions d’intérêt public. La liberté de la presse implique la liberté d’écrire sans censure préalable, mais non l’immunité contre les poursuites pénales ultérieures. La presse est libre, mais elle doit aussi être responsable.

Les Canadiens jouissent en outre de la liberté d’association et de réunion. Il leur est permis de former toutes sortes d’associations bénévoles pour atteindre les fins qui les intéressent, sans intervention aucune de la part des gouvernements. Ces associations, qui sont elles-mêmes un témoignage de la liberté de réunion et de parole, peuvent contribuer d’une façon importante à nous faire jouir davantage de nos libertés.

La loi du pays

Notre liberté est si grande qu’il faut parfois lui imposer des bornes. Les lois sont essentielles au bon fonctionnement de la société, et il est nécessaire de les respecter en tant que condition de notre liberté. Il n’existe pas de moyen terme entre la souveraineté de la loi et la tyrannie du plus fort.

Les tribunaux ont pour mission de veiller à ce que personne ne porte atteinte à la liberté et à la sécurité de tous les résidents du Canada. Le principe général de notre régime est le suivant : « Tout homme est libre de faire ce qu’il veut à condition de ne pas empiéter sur la liberté identique dont jouissent également les autres. »

Nos droits fondamentaux devant la loi sont : 1° Le droit à un juste procès ; 2° Le droit d’être considéré innocent jusqu’à preuve de culpabilité. Au Canada, personne ne peut être arrêté si ce n’est pour un motif valable. Dès son arrestation, la police est tenue d’informer l’inculpé de l’accusation qui pèse contre lui et de lui permettre de demander l’aide et les conseils d’un avocat. Le procès doit avoir lieu à huis ouvert.

Il n’existe pas de police secrète au Canada. Les agents de police sont des fonctionnaires de l’État. Il y a un seul code commun de droit pénal pour le pays tout entier. Les juges sont indépendants, non en ce sens qu’ils sont exempts de toute contrainte, mais parce qu’ils sont à l’abri de toute influence indue.

La liberté du travail fait partie de notre mode de vie. Pas un seul de 500,000 enfants qui naissent chaque année au Canada ne vient au monde avec l’étiquette de « commis », de « fabricant d’outils », de « programmeur », de « cadre » ou de « manoeuvre ». Chacun a la liberté de choisir sa profession ou son métier.

Les nouvelles inventions et les progrès rapides de l’industrie offrent à chacun la possibilité d’avancer d’emploi en emploi. Tout travailleur est libre de démontrer ses talents, sa compétence et sa valeur personnelle. Employés et employeurs ont toute latitude pour négocier les conditions de travail.

La liberté de choisir

La liberté de choisir s’applique à d’autres aspects de la vie. Ce qui est fondamental dans le choix, c’est de savoir distinguer entre ce qui est important et ce qui ne l’est pas, car il ne peut y avoir de choix sans possibilités aléatoires. Le choix comporte des risques d’erreur, et les erreurs se paient toujours de quelque façon. Il en découle que la liberté de choisir ne va pas sans certains inconvénients, puisqu’elle nous oblige à prendre des responsabilités.

L’esprit de la démocratie canadienne consiste à assurer l’égalité des chances à tous les citoyens sous le régime d’institutions libres et de lois identiques pour tous. Cela ne confère pas l’égalité des aptitudes, mais la liberté de perfectionner et de faire valoir ses aptitudes. Le but recherché est plutôt de supprimer les inégalités qui ne sont pas naturelles, mais artificielles, afin d’offrir autant que possible des chances égales à tous d’utiliser les dons qu’ils possèdent.

L’égalité est un mirage pour ceux qui demandent avec envie : « Pourquoi ne jouirais-je pas de ce dont les autres jouissent » sans faire le nécessaire pour mériter d’en jouir. Supposons deux hommes également bien instruits et également à même de réussir dans les affaires : si l’un travaille ou étudie pour se perfectionner tandis que l’autre reste couché toute la journée, qu’advient-il de l’égalité ?

Tout citoyen est libre d’aller et venir à son gré, de voyager dans tout le pays sans entraves, sans papiers, ni documents, ni étiquettes d’identité. Il peut changer de résidence aussi souvent qu’il le désire, sans avoir à le déclarer aux autorités. Rien ne l’empêche de quitter le pays et d’y rentrer.

Parmi les autres libertés se range celle qui concerne l’intimité. L’homme civilisé tient beaucoup à la liberté de sa vie privée et sait, en retour, respecter la vie privée des autres. Il s’occupe de ce qui le regarde et s’interdit toute curiosité désoeuvrée et indiscrète.

Enfin, dans l’imposant éventail de libertés dont disposent les Canadiens vient la liberté de religion, la liberté d’adorer Dieu de la façon de son choix. L’Annuaire du Canada dénombre quinze grandes confessions religieuses dans notre pays. Même si huit personnes sur dix ont déclaré qu’elles appartenaient à l’une des trois religions les plus importantes par leur nombre, il reste que 3,800,000 autres citoyens adhèrent à d’autres fois.

La liberté religieuse qui nous est assurée au Canada comprend non seulement la liberté de culte, mais aussi le droit de ne pas être exclu des fonctions publiques ou des honneurs civiques pour des motifs d’ordre religieux.

Tolérance et liberté

Celui qui veut jouir de la liberté doit se montrer tolérant. Il doit accepter que les autres soient différents de lui. S’il lui est permis de se tenir éloigné des personnes qui lui déplaisent, il n’a pas le droit pour autant de leur rendre la vie désagréable. Ces paroles de Stuart Mill sont toujours d’actualité : « Si tous les hommes sauf un étaient du même avis et qu’une seule personne, par conséquent, fût d’un avis contraire, l’humanité ne serait pas plus en droit de réduire cette unique personne au silence que celle-ci ne le serait de réduire l’humanité au silence si elle en avait le pouvoir. »

« La tolérance, dit Everett Dean Martin dans son livre intitulé Liberté, est une meilleure garantie de liberté que l’amour fraternel, car il se peut qu’un homme aime tant son frère qu’il se croie chargé d’en être le gardien et le régent. »

Le dialogue, les échanges d’opinions favorisent la compréhension. La vie et le savoir sont aujourd’hui si complexes que seule la libre discussion nous permet de trouver notre route parmi les erreurs et les préjugés.

Naturellement, le dialogue ne doit pas être un duel oratoire. Il exige de la modération dans le langage, de la courtoisie, ainsi que l’art de faire la part des choses et d’écouter. Il se peut que le droit de parier soit le commencement de la liberté, mais ce qui fait l’importance de ce droit, c’est la nécessité d’écouter.

Liberté oblige

De toutes les formes de gouvernement, la démocratie est sans aucun doute celle qui table le plus sur la dignité humaine. Il ne s’agit pas d’une dignité imposée par la loi, acquise par l’instruction ou fondée sur le rang social. C’est la dignité du respect de soi et du perfectionnement personnel, basée sur la maîtrise de soi, condition essentielle de la vie démocratique. Elle est le propre du citoyen qui sait se conduire de telle sorte qu’il n’a pas besoin de contraintes extérieures.

Même s’ils ont pu commettre certaines erreurs dans l’administration des institutions libres, nos pères ont fait preuve d’une sagesse remarquable pour l’époque où ils ont vécu. Nous ne pouvons pas rejeter impunément les pratiques et les régimes qui ont, pendant un millénaire, été la source d’inspiration, le rempart et les titres de noblesse de nos libertés, mais il nous est possible d’y ajouter et de les améliorer.

Pour profiter de notre liberté, nous devons nous garder de nous endormir sur nos lauriers. Le sentiment de l’objectif atteint ou de l’abondance assurée engendre l’ennui, et l’ennui peut entraîner la destruction de la démocratie.

Les institutions sont incapables d’offrir ou de conserver la liberté si les hommes ne comprennent pas que la liberté est un bien précieux et ne veulent pas se donner la peine d’en entretenir la flamme.

C’est là un enseignement qu’il faut inculquer aux enfants dès le bas âge. Tout en évitant de se laisser obséder par l’idée d’une liberté chauvine et sacro-sainte, les éducateurs doivent encourager et préparer les jeunes à penser par eux-mêmes et à découvrir ainsi que, pour être en fin de compte autre chose que des machines, il leur faut apprendre à maîtriser leurs actions. Assurer une saine éducation à la jeunesse, c’est l’un des grands devoirs qui incombent aux citoyens libres.

La liberté absolue

Aucune société ni aucun individu ne jouit d’une liberté assez absolue pour pouvoir se dispenser de pratiquer une certaine discipline. Si grande que soit notre admiration pour la liberté, nous sommes heureux, en nous levant chaque matin, d’avoir à faire quelque chose qui doit être fait, que nous le voulions ou non.

L’image du sauvage sans loi, errant en liberté dans les bois, est purement fictive. Toujours dans l’histoire, depuis l’apparition du tam-tam primitif jusqu’à l’invention de la bombe atomique, les hommes ont été assujettis à des forces qui restreignent leur liberté.

Personne ne saurait revendiquer la possession d’une forme spéciale ou personnelle de liberté parmi les hommes libres. On ne jouit pas de la liberté en restant prisonnier des vieux préjugés, en considérant la liberté comme une chose bonne dans certaines circonstances pour certaines catégories de personne ou en versant dans l’excentricité pour montrer comment on conçoit la liberté. Ces erreurs évoquent tristement la phrase célèbre que prononçait Mme Roland en montant sur l’échafaud : « 0 liberté, que de crimes on commet en ton nom ! »

Le mode de vie canadien

Le mode de vie canadien est synonyme de liberté. Il préconise et met en honneur les lois humanitaires, les moeurs civilisées, les coutumes bienfaisantes et les bonnes relations humaines. Les conditions d’existence qu’il comporte sont telles que tous les citoyens sans distinction disposent des possibilités les plus grandes d’exprimer leur personnalité.

Le Canada est accueillant pour les nouveaux venus qui ressentent l’obligation de s’adapter à notre pays et de s’y intégrer. Ces gens ont leurs traditions, leurs cultures et leurs antécédents, mais sont unis à tous les autres Canadiens par les liens de leur amour de la liberté. Ils ressemblent aux exécutants d’une danse avec choeur qui chantent à l’unisson, même si chacun a sa partie propre et si à certains moments une voix se fait entendre pendant que les autres font silence. Chaque membre apporte au choeur un peu de lui-même.

Il est bon que les amis de la liberté aient de l’idéal, de l’enthousiasme et de la détermination, et ces qualités méritent notre respect. Mais, pour que fleurisse la liberté, il faut que ces vertus soient tempérées par la modération, le bon jugement et une bienveillante considération pour le bien des autres.

Chacun est libre de rechercher la supériorité telle qu’il l’entend, mais ce n’est que dans la liberté démocratique, comme elle existe au Canada, que l’homme peut trouver la possibilité de faire valoir toutes ses aptitudes. Et il en est ainsi parce que dans la société qui est la nôtre, la jouissance de la liberté accordée à chaque citoyen n’a d’autre limite que la liberté identique reconnue à tous les autres.