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Pour le chef de famille comme pour le directeur d’entreprise, d’usine, de banque ou d’équipe de base-ball, diriger c’est servir de conducteur ou d’animateur à une collectivité quelconque. La direction est un service où le sens de la responsabilité générale l’emporte sur l’esprit d’aventure personnel.

Quel est le but que poursuit le directeur ou le chef ? C’est de faire en sorte que tout ce qu’il accomplit et ordonne assure le meilleur rendement possible. La prospérité d’une entreprise repose sur l’utilisation optimale des efforts des êtres humains qui y travaillent. Il appartient au directeur d’organiser et de guider ces efforts.

Les esprits romanesques sont portés à ne regarder que le bon côté du succès dans les affaires. Mais les personnes réalistes l’examinent à la loupe afin d’en discerner toutes les facettes, et c’est là la manière d’agir la plus souhaitable pour quiconque ambitionne de réussir dans la direction.

L’administration exige à la fois des aptitudes remarquables et des dons naturels. C’est une activité d’autant plus extraordinaire qu’elle embrasse tout : personnes, choses, ressources financières, événements, etc. Elle est à la croisée des difficultés et des problèmes les plus divers.

Il incombe au directeur de constituer et de faire fonctionner une organisation composée d’hommes et de femmes doués de compétences et de talents utiles à l’entreprise. Son rôle consiste ensuite à assurer un climat qui permette à ces personnes dissemblables de travailler en tant qu’équipe. Sa valeur administrative prime ses connaissances techniques. Il fait marcher l’entreprise dans l’efficacité et l’harmonie. Même s’il y a un virtuose à chaque lutrin de l’orchestre, il faut quelqu’un au pupitre pour diriger.

Les impératifs

S’il existe un impératif de la direction, on peut le résumer en trois mots : vigilance, action, responsabilité. Ces qualités se manifestent dans l’attitude du chef devant les problèmes et les dangers et dans sa recherche des objectifs. Il y a un proverbe qui dit qu’une armée de moutons conduite par un lion peut vaincre une armée de lions conduite par un mouton, mais le lion qui préférerait conduire des moutons n’est pas un lion ; il n’est qu’un mouton qui a des illusions de grandeur.

Le directeur est responsable en fin de compte de tout ce qui se produit dans son service ou son secteur, qu’il s’agisse d’un succès ou d’un échec. Son rôle n’est pas de donner une bonne impression de lui-même, mais d’obtenir l’action désirée. Démosthène disait à un orateur rival : « Tu amènes les auditeurs à dire ‘Comme il parle bien !’ – Je les amène à dire : ‘Marchons contre Philippe !’ »

Quels que soient les instruments, les trucs ou les méthodes que l’on invente pour faciliter l’administration des entreprises, le rôle du chef est et demeure toujours celui de diriger des hommes. Il doit avoir un esprit méthodique et le sens de l’humain ; il lui faut allier les qualités du rêveur à celles de l’artisan réaliste. Il doit non seulement pouvoir organiser avec soin mais savoir improviser quand les plans se gâtent.

Pour être à la hauteur de toutes ces exigences : création, direction et contrôle, le chef est tenu de prévoir sa route. S’il néglige de le faire, il sera comme une table boiteuse dont les pieds inégaux sont équilibrés par des cales de papier.

La solution des problèmes

L’une de vos principales fonctions, si vous êtes chef ou directeur, sera de résoudre les problèmes les plus divers, et c’est là un des plus grands plaisirs de la vie.

La créativité chez un chef consiste à découvrir un problème, à réunir les faits qui s’y rapportent, à ruminer les données, à les agencer en des combinaisons nouvelles, à découvrir une solution éventuelle, puis à en contrôler l’exactitude et l’applicabilité.

Voici, en termes simples, une formule à utiliser pour aborder un problème : 1° Se demander en quoi consiste le problème. Le définir, le circonscrire, le décomposer, en saisir l’essentiel. 2° Mettre les solutions éventuelles en juxtaposition. Si je fais ceci, le résultat sera tel ou tel, tandis que si je fais cela, le résultat sera autre. 3° Essayer une solution pour voir si elle va. Est-elle complète et appropriée sans aller trop loin ? 4° Cette solution est-elle possible avec mes ressources actuelles ou me faut-il plus d’argent, plus de personnel ou plus d’espace ? Vais-je les avoir ? Sinon, il faut reprendre le travail et rechercher une solution de rechange.

Exercez-vous sur les petits problèmes que présentent vos fonctions actuelles, ou bien posez-vous des problèmes et efforcez-vous de les résoudre par écrit. À mesure que vous monterez en grade, les problèmes que vous serez appelé à régler changeront de nature. Ils deviendront moins spécialisés et plus généraux et fondamentaux ; leur portée et leur variété s’accroîtront, mais la façon de les résoudre demeurera la même.

Les relations humaines

Toutes les inventions techniques du monde ne sauraient dispenser le chef d’avoir à résoudre des problèmes humains. Il doit affronter et dénouer toutes sortes de crises, depuis les sautes d’humeur d’un adjoint jusqu’au fait qu’un conducteur de machine ayant oublié, la veille, de tourner un commutateur électrique, la production se trouve suspendue en attendant que l’appareil soit réparé.

Tout en étant résolu dans sa recherche de l’efficacité, le directeur doit faire preuve d’une prudence et d’un tact réfléchis. Il lui serait facile de se laisser entraîner, dans sa hâte d’atteindre un objectif, à négliger les personnes en cause. L’éléphant peut bien mettre le pied sur une fourmilière sans penser aux ravages qu’il cause ainsi chez les fourmis.

Le chef n’accomplit rien à lui seul. Sa direction sert à mettre en valeur les meilleures qualités et les meilleurs efforts des autres. Cette tâche délicate d’améliorer le rendement et le comportement des employés exige que le chef sache mériter et conserver la sympathie de ceux qui l’entourent. Il doit les aider à comprendre que leur travail est un élément important et noble dans leur vie.

Celui qui est chef est moins exposé à voir les gens contester sa compétence technique qu’à les entendre critiquer ses faiblesses en matière de relations humaines. Même dans les moments de presse, il ne faut jamais pécher par excès dans les reproches ou les réprimandes. Un dramaturge grec formule ainsi cette obligation : « Notre haut rang, grâce à un long apprentissage de la grandeur, sait user de sa puissance avec douceur. »

Il faut pour cela être magnanime : se montrer indulgent pour ceux qui ne saisissent pas vite ; tolérer les erreurs à condition qu’elles ne nuisent pas essentiellement à l’efficacité. Même lorsqu’il semble n’y avoir aucun espoir d’obtenir un rendement à peu près parfait d’un employé, il faut essayer d’en tirer quelque chose.

Beaucoup de chefs gouvernent par l’affection. Si votre service ou votre secteur marche bien, vous n’avez nullement à vous excuser d’avoir fondé votre sécurité sur l’affection de votre personnel plutôt que sur votre autorité.

Quelle que soit la régularité avec laquelle le travail paraît s’accomplir, il surgira toujours des choses qui réclameront votre attention. Si un employé est continuellement dans le pétrin ou toujours en retard dans son travail, votre premier mouvement sera de trouver qu’est-ce qui ne va pas chez lui. Mais n’oubliez pas de rechercher aussi s’il n’y a pas quelque chose qui cloche dans la situation. L’organisation lui offre-t-elle la possibilité de bien remplir ses fonctions, de montrer tout ce qu’il sait faire ?

Dans les rapports avec le personnel, il est préférable de s’appliquer à convaincre et à persuader plutôt que de se montrer autoritaire. Aidez vos collaborateurs à comprendre vos plans en vous mettant à leur niveau pour leur en parler. Efforcez-vous de les intéresser et de leur faire partager votre idée, et sachez écouter leurs points de vue avec courtoisie.

Le chef créateur n’est pas égocentrique. Il reconnaît que les autres ont des connaissances et des vues qu’il n’a pas. D’ailleurs, il n’est pas tenu de savoir tout ce que savent ses subordonnés ni d’être expert dans chaque détail de leur travail.

Le choix des collaborateurs

Il doit y avoir de la variété parmi vos collaborateurs immédiats. Le Christ n’a pas choisi les apôtres parce qu’ils étaient des béni-oui-oui ou des sosies les uns des autres. Il y avait Pierre le fougueux, André le travailleur, Jean le poète, Simon l’ardent zélateur et Thomas le mélancolique. Il est rare qu’un seul homme dispose de tout le savoir encyclopédique nécessaire pour exercer toutes les fonctions de direction.

Il est difficile de demeurer spectateur lorsque le résultat du travail est d’une extrême importance, mais cela fait partie de votre métier de chef. Vous devez savoir répartir l’autorité dans toute la mesure du possible, à condition de conserver la majorité absolue des actions. Si vous en cédez davantage, vous finirez peut-être par être dans la même situation que le roi Lear, qui, ayant renoncé à son trône, croyait que tout le monde allait continuer à le traiter en roi.

Le choix des adjoints ne doit pas se faire au hasard. Machiavel écrit dans Le Prince que « la première opinion que l’on se fait d’un prince et de son intelligence se forme en observant les hommes qu’il a autour de lui. » En vous entourant de médiocrités, vous vous imposez un double désavantage : vous vous esquinterez à réfléchir à la place de ces mauvais employés et vous vous casserez les reins à porter des fardeaux qu’ils devraient porter eux-mêmes ; vous ne tirerez jamais aucun parti de leurs esprits médiocres, car ils n’ont aucune solution neuve à vous offrir.

Même si vous connaissez bien vos collaborateurs, observez-les de plus près afin de savoir si leur collaboration ne pourrait pas être encore plus efficace. Donnez-leur la chance de montrer ce qu’ils peuvent faire. Amenez-les à résoudre un peu plus de leurs problèmes sans votre aide.

La délégation bien comprise a une double utilité : elle vous rend libre de consacrer votre activité créatrice à des travaux importants et elle constitue une technique nécessaire pour favoriser la formation et le perfectionnement des subordonnés. Veillez surtout à ce que chacun sache quels sont les résultats que l’on attend de lui, qu’il a carte blanche pour les atteindre et qu’il est responsable de la complète exécution de la tâche.

Soyez positif

En tant que chef ou directeur, il vous incombe de manifester la confiance qui s’impose dans vos plans et vos décisions, de faire preuve de courage et de résolution. Une fois convaincu de la justesse de votre ligne de conduite, ne vous en laissez pas détourner par les obstacles.

Ayez à coeur de bien remplir votre rôle. En accédant à la direction, vous dites adieu à l’emploi du pronom « ils ». Il ne vous est plus possible de vous retrancher derrière l’expression « ils veulent que cela se fasse ainsi ». Désormais, c’est « nous » qu’il faudra dire. Jusque-là, vous aviez la réconfortante arrière-pensée que si une décision était trop difficile, vous pouviez vous en référer à l’autorité supérieure. Votre fonction de chef ne saurait se borner à canaliser le flot des problèmes vers le bureau du président.

Une courageuse affirmation de soi est essentielle. Si vous doutez de vous-même, vous n’offrez aucun point d’appui à vos employés. Ceux-ci veulent un chef en qui ils peuvent avoir confiance. Vous devez affermir sans cesse votre compétence. Votre horizon doit s’élargir et votre perception s’aviver.

Votre humeur et votre maintien personnels, la variété et la qualité de vos goûts et de vos préférences, l’ampleur de votre manière de voir comptent parmi les instruments de base de votre trousse de chef. Ils serviront à établir les fondations qui vous permettront d’être fort et énergique, de posséder un jugement qui ne flanche pas aux moments critiques. Vous devrez être prêt à prendre des risques calculés avec le minimum d’inquiétude. Le temps de la timidité est passé. C’est un coup fatal pour l’autorité et la dignité que de donner des ordres et de se sentir comme le petit garçon qui lance une pierre et s’enfuit.

La largeur de vues

Le chef doit avoir une intelligence clairvoyante et générale du monde où il vit. Il ne saurait être un spécialiste entièrement préoccupé par son travail, passionné pour un aspect de son secteur ou de son service. La souplesse d’esprit et le talent créateur du chef supposent qu’il est capable de voir l’entreprise dans son ensemble.

Le chef ne se contente pas de constater des faits ; il conçoit aussi des idées. Il lui faut parfois rompre l’équilibre et déranger les choses. Une certaine dose de dynamisme juvénile s’impose chez lui pour contrebalancer les tendances immobilistes.

Il est essentiel de s’habituer à l’idée du mouvement, de la force, de la vitesse, de l’accélération. Sir John Hunt, qui dirigea la conquête du mont Everest en 1953, donne ce conseil aux chefs : « Recherchez une tâche difficile à accomplir, quelque chose qui mettra votre talent à l’épreuve, puis mettez-vous à l’oeuvre et accomplissez-la. »

L’art d’envisager les choses de loin doit devenir chez vous une tournure d’esprit. Cette habitude fortifiera votre disposition, dans votre vie privée comme dans votre vie professionnelle, à prévoir et à élaborer des plans pour les années à venir.

Votre situation comporte certaines obligations sociales. Vous devez connaître les conséquences sociales de ce qui se fait sous votre direction. Il est important de vous attirer la bienveillance des personnes de l’entourage extérieur de votre bureau ou de votre usine. Ainsi que le dit Xénophon : « Il est beaucoup moins difficile de gravir une forte montée sans combattre que de suivre une route plane de chaque côté de laquelle se trouvent des ennemis. »

Pour avoir des vues larges, il faut se renseigner. L’intuition est un piètre succédané de la recherche. Vous devez savoir poser les bonnes questions, les questions qui font réfléchir, qui amorcent l’action et engendrent l’amélioration. Il y a de nombreuses façons d’obtenir des renseignements d’ordre quantitatif : il appartient au chef d’en apprécier la qualité et les possibilités d’application.

Gardez l’équilibre

Par-dessus tout, gardez votre équilibre. Ce que l’on exige surtout du chef, c’est de pouvoir compter sur lui. Même si ses supérieurs ou ses inférieurs vacillent, le chef, pour tenir son rang, doit avoir le pied ferme et le pas assuré et posséder une fidélité inébranlable.

Il se peut qu’il vous soit impossible d’atteindre votre but immédiatement. Le manque de ressources, la nécessité de faire vite, les exigences contradictoires de vos horaires, voilà autant d’entraves possibles. Adaptez-vous avec sagesse aux circonstances : acceptez de bonne grâce ce que vous ne pouvez empêcher ; sachez mettre les pouces quand il le faut. Un philosophe sur qui son empereur l’avait emporté dans une discussion disait : « Je n’ai jamais honte d’être convaincu d’erreur par un homme qui commande cinquante légions. »

Aborder les tâches de façon méthodique. S’il est une chose que l’homme compétent ne peut souffrir, c’est le désordre. Les petits esprits s’imaginent que c’est un signe d’importance et d’indispensabilité que d’avoir un bureau encombré de papiers. Le bon chef sait que le mouvement continu des documents entre sa boîte à courrier « arrivée » et sa boîte à courrier « départ » est l’une des nécessités de sa charge.

Tout cela exige que le chef soit à la fois un homme de réflexion et un homme d’action. Les problèmes de direction qui doivent être tranchés en une fraction de seconde sont assez rares. Il est sage et habituellement possible de retarder votre jugement d’une heure ou deux. Cela vous permettra de repasser dans votre esprit les conséquences éventuelles et probables de votre décision.

Comment s’y prendre

Le don de diriger a-t-il quelque chose de mystérieux ? Il se peut que deux personnes fréquentent la même école et la même université, qu’elles étudient les mêmes matières, réussissent les mêmes examens, mais que l’une devienne un bon chef et l’autre un routinier. Le premier a les mêmes connaissances que le second, mais il a en plus la faculté d’assimiler, d’intégrer, d’évaluer et d’appliquer aux problèmes la totalité des données et de trouver les bonnes solutions.

Quiconque aspire au poste de chef doit s’entraîner à dépister avec courage ses faiblesses éventuelles et à faire le nécessaire pour les corriger. Dans son livre intitulé La Direction moderne, principes et méthodes, Dick Carlson nous propose quelques questions directrices. 1° Quels sont mes objectifs personnels ? Que veux-je accomplir dans la vie ? À quelle fin ? 2° Pourquoi fais-je des efforts dans ce sens ? Est-ce pour des valeurs permanentes ? temporaires ? 3° Quand cela sera-t-il accompli ? Quel est mon calendrier ? 4° Où en suis-je ? Où vais-je ? 5° Comment atteindrai-je mes principaux objectifs ? Comment puis-je améliorer mes résultats actuels ? 6° Qui sont mes conseillers les plus utiles ? mes critiques ? Qui fait autorité dans mon domaine ?

Ce petit guide, aussi pratique que stimulant, de Carlson est en vente chez l’Imprimeur de la Reine, à Ottawa, et ne coûte que $2.

Même si vous êtes déjà chef, ces questions vous conduiront à des réponses qui vous feront entrevoir des possibilités d’amélioration personnelle. Le travail de direction devient de plus en plus professionnel, en tant qu’activité distincte en soi, et ce changement exige une formation permanente, toujours à la hauteur des tendances nouvelles. Personne ne peut se permettre de se croiser les bras, même après avoir acquis le titre de chef.

Pour apprendre le métier de chef, il n’est pas absolument nécessaire de suivre des cours dans une université ou un établissement d’enseignement. Il s’agit d’avoir de bons livres, même si l’on travaille dans un endroit isolé. La lecture et l’étude à la maison comportent beaucoup d’avantages pour qui s’intéresse suffisamment à son perfectionnement.

L’aiguillon du changement

Vous avez connu jusqu’ici une carrière honorable. Pouvez-vous vous engager dans une ère nouvelle, qui exige non seulement des talents différents, mais aussi de nouvelles façons de voir les choses ?

Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est la continuité du changement. Il ne s’agit plus de branle-bas spasmodiques comme le ménage du printemps, mais d’une évolution progressive. Il faut maintenant considérer le perfectionnement de votre savoir et de vos méthodes de travail comme une nécessité courante. Le chef de demain devra être en mesure de passer avec assurance de la théorie à l’action dans des situations qui différeront de tout ce qu’ont connu les générations antérieures.

Pourtant, les qualités fondamentales de la direction demeurent : ce sont la patience, le jugement, la résolution, l’engagement, l’initiative, l’esprit d’entreprise, l’intégrité, l’enthousiasme, la vigilance et le sens de la responsabilité. L’art de la direction sombrera tout aussi sûrement dans la désuétude s’il vient à manquer de l’une ou l’autre de ces qualités que s’il refuse de s’adapter aux progrès techniques.

Qu’est-ce qui contribue au vieillissement des cadres ? Le manque d’initiative et d’esprit d’entreprise : le chef est satisfait du statu quo, ancré dans sa routine, peu disposé à tenter une innovation, prévenu contre les spécialistes, convaincu que l’ancienne manière de faire est préférable aux méthodes nouvelles. Il ne veut même pas essayer les bottes de sept lieues que nécessiteront les pas de géant de demain.

Le chef qui lutte activement contre la désuétude s’intéresse à ses progrès et à son perfectionnement personnels ; il a la conviction d’être capable de s’initier à de nouvelles manières de faire les choses et de les améliorer ; il croit à la valeur de son métier. Lorsque quelqu’un de son entourage lui dit : « Nous nous lançons dans une entreprise fort difficile », il sourit dans sa barbe en songeant que ce sont les difficultés qui permettent aux hommes de donner le meilleur d’eux-mêmes et qu’il est prêt à soutenir l’épreuve. S’il n’y avait pas d’obstacles à surmonter, le métier de directeur perdrait la moitié de son intérêt et de son charme.

Une manière de vivre

Le rôle de chef ou de directeur a des exigences incessantes. Les problèmes s’agglutinent autour de lui un peu comme les nouvelles masses de nuages qui surgissent dans le ciel par un jour d’orage avant même que le dernier point noir se soit dissipé dans le firmament ou ait disparu au-dessous de l’horizon.

La direction est plus qu’un métier : c’est une manière de vivre. Les responsabilités de l’administration marquent toute la vie d’un homme et sont marquées en retour par tout ce qu’il accomplit dans sa vie. Le haut potentiel nerveux qui fait la force du chef d’entreprise ne peut se réaliser que dans un juste équilibre de toutes les activités qui sont à la base d’une existence féconde.

Pour s’acquitter avec succès de sa charge de gardien du bien-être de son service, de sa direction ou de son équipe, le chef doit être à la fois compétent, persévérant, vigilant, loyal, sincère et compréhensif. Il doit savoir démêler les enchevêtrements, assurer la continuité après une catastrophe et rétablir l’harmonie.

Une fois toutes ces qualités acquises, le chef qui a de l’ambition s’appliquera à les améliorer jusqu’à la perfection.