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L’état supérieur auquel l’homme est parvenu dans l’évolution des espèces est attribuable au fait que petit à petit son intelligence s’est développée au cours des temps et qu’il a appris grâce à elle à connaître la qualité des choses et à maîtriser les moyens de les améliorer. Tout ce que l’être humain a inventé et accompli sur la terre a connu des débuts modestes.

Les plus grands succès sportifs tiennent souvent à des fractions de points. Le nageur le plus rapide du monde n’a devancé ses concurrents que de quelques pouces. Dans le slalom géant féminin de Squaw Valley, il n’y eut qu’une différence d’un dixième de seconde entre le vainqueur et le gagnant du deuxième prix.

Léonard de Vinci nota dans son carnet que lorsqu’une goutte d’eau tombe dans la mer toute la surface de la mer s’élève imperceptiblement ; et, ailleurs, que « la position de la terre est modifiée par le poids d’un petit oiseau qui vient s’y poser ».

La « goutte d’eau dans l’océan » n’est pas sans importance. Elle peut avoir une très grande portée par le résultat qui en découle. Prenons par exemple les affaissements de terrain au Québec et les effondrements dans certaines parties des États-Unis. On ne retrouve aucun grand cataclysme à la source de ces événements terrifiants et de ces pertes de terre arable, mais uniquement de petits cours d’eau rongeant leurs rives ou une faible chute du niveau des nappes d’eau souterraines.

La mise en orbite du deuxième satellite canadien de télécommunications intérieures, Anik II, fut retardée de 24 heures par la disparition d’un petit morceau de ruban adhésif là où il aurait dû être sur un accessoire de la plate-forme de lancement.

Dans un vitrail, chaque menu triangle ou carré de verre compte. Dans une mosaïque, chaque morceau de pierre ou de marbre est indispensable. Un auteur nous conseille de penser, en regardant la queue d’un paon, à la petite particule de matière de l’oeuf d’où elle tire son origine.

En écrivant : « Prendre sept parties de salpêtre, cinq de charbon et cinq de soufre », le moine anglais Roger Bacon ne pouvait prévoir l’influence qu’aurait sa formule sur le cours de la civilisation. Il s’agissait des éléments de la poudre à canon.

La machine la plus connue dans le monde à l’heure actuelle est l’automobile. Pensez aux millions de pneus gonflés à l’air qui roulent sur nos routes. Ils furent inventés à Belfast, en Irlande, par le vétérinaire John Dunlop, qui imagina de garnir les roues en bois de la bicyclette de son fils d’un bandage tubulaire pneumatique.

Veut-on des exemples qui nous touchent de plus près. Songeons aux gains de temps et d’argent que représentent les petits travaux d’entretien faits au moment voulu. Le serrage d’une vis à bois, le graissage d’un essieu, le nettoyage d’un tuyau, la réparation d’un interrupteur défectueux, voilà autant de petites choses qui contribuent à nous épargner de l’argent, du temps et des ennuis.

Les petites choses sont importantes non pas en elles-mêmes, mais parce qu’elles sont liées ou conduisent inévitablement à quelque chose de très important. Pascal affirme dans ses Pensées que si le nez de Cléopâtre eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé.

Tout commence modestement

Que notre but soit d’accomplir quelque chose, de faire quelque chose, d’améliorer quelque chose, de défendre quelque chose, tout n’est d’abord qu’une petite idée ou une petite action. Il faut faire beaucoup de petites choses pour en réaliser une seule grande.

Un artiste peut dessiner ou peindre à large coups de pinceau une suite infinie de hautes montagnes, mais il en marquera les fuyants par de fines lignes ou un léger estompage.

Il faut user de notre sens des proportions pour juger de ce qui est petit et de ce qui est grand. Les choses qui semblent importantes à l’heure et dans les circonstances actuelles paraîtront peut-être insignifiantes demain et dans un contexte différent.

Lorsque des capsules commémoratives furent enfouies dans les profondeurs du sol de New-York en 1965, nous y avons enfermé des spécimens des choses dont nous sommes fiers : photographies de villes, de navires, d’automobiles, d’avions et de fusées ; échantillons d’objets en plastique, d’outils, d’articles de toilette ; livres reproduits sur microfilms. Comme ces choses paraîtront banales et pitoyables à ceux qui ouvriront les coffrets dans cinq mille ans ! Le contenu est déjà dépassé.

La nécessité de l’observation

Il est peu judicieux d’attribuer un trop grand rôle au hasard ou à l’inspiration dans la genèse des idées, des inventions et des succès. Le hasard n’invente rien ; il offre seulement l’occasion à celui qui sait observer d’appliquer son esprit à la situation qu’il révèle.

Lorsque son enfant renversa un rouet, laissant le fuseau tourner verticalement, James Hargreaves eut l’idée de réaliser une machine à filer à plusieurs broches. C’est le hasard qui permit à George Stephenson de mettre en mouvement une machine vapeur qui avait besoin de réparations, puis de construire une locomotive. Charles Dickens voulait devenir acteur, mais on le refusa parce qu’un rhume de cerveau lui avait laissé la voix enrouée. Cette circonstance fortuite lui fit adopter le métier d’écrivain où il acquit une célébrité universelle.

Voilà des hasards qui ont apporté des idées et des occasions favorables à des hommes assez perspicaces pour les déceler. D’ordinaire, la chance ne s’impose pas à notre attention avec ses bienfaits. Il nous faut être aux aguets pour saisir le moindre indice de la possibilité de faire quelque chose de valable.

Un proverbe birman dit : « Il n’y a pas d’or dans toutes les pierres, mais il n’y a pas de mal à regarder. » Sherlock Holmes met à la base de ses découvertes son souci d’observer les vétilles, comme il le dit à Watson dans Le Mystère de la vallée de Boscombe.

Le radar et la pénicilline comptent parmi les découvertes remarquables des dernières années. Tous deux sont nés de l’observation par un chercheur attentif d’un phénomène sans rapport avec ses préoccupations immédiates. Dans un cas comme dans l’autre, l’attention a éveillé la curiosité et l’imagination de l’homme de science.

Il est d’autres exemples. Un soir, un professeur de musique, Robert Foulis, revenait chez lui, dans le brouillard, à Saint-Jean au Nouveau-Brunswick. Prêtant l’oreille au son du piano familial pour savoir si sa fille exerçait le morceau qu’il lui avait donné pour leçon, il constata avec étonnement qu’elle ne semblait jouer qu’une seule note grave et basse. C’est alors que lui vint l’idée géniale que c’était là l’unique note qui perçait le brouillard. Il fabriqua une chaudière à vapeur et y relia un sifflet dont le son correspondait à la note en question. Et c’est ainsi que fut inventée la corne de brume à vapeur.

Le petit grain de sénevé

Certaines observations produisent des idées qui mettent longtemps à se confirmer et à se propager. Dès 1899, Nicola Tesla prédisait que les ondes hertziennes pouvaient servir à établir la position et la route d’un objet en mouvement, tel un navire en mer. En 1930, Robert Watson-Watt, à la tête d’une petite équipe de recherche, constate que des avions en vol renvoient des signaux réfléchis lorsqu’ils sont heurtés par des ondes radio-électriques. C’est ainsi que naquit le radar.

L’idée est comme une graine. Il faut la semer, la cultiver et en cueillir les fruits. « Dans mes plaidoyers au tribunal, nous dit Pline, je sème à tout vent divers arguments comme autant de graines, afin de récolter tout ce qui pourrait en lever. »

On ne rejette pas une idée uniquement parce qu’elle est petite. Saisissez-vous de la moindre idée et exploitez-la avant qu’elle s’évanouisse, peut-être pour toujours. Le matin où K. C. Gillette trouva son rasoir à manche un peu trop émoussé, il commença à se demander pourquoi il avait été jugé nécessaire d’affiler une longue lame d’acier alors qu’on n’avait besoin que d’un fin tranchant. Cette idée lui inspira le rasoir de sûreté à lame mince.

On insiste souvent sur la nécessité de ne pas avoir d’idée préconçue, et c’est assurément une qualité digne d’éloges. Mais il faut aussi avoir un esprit interrogateur, qui n’accepte pas d’emblée toute nouveauté, mais l’arrête à la porte pour en vérifier le passeport.

Nous devons être capables de discerner les valeurs et de les analyser. Considérez une idée comme une chose précieuse et fragile. Prenez-en note sur-le-champ. Aussi bien ne pas avoir une idée que de l’avoir et ne pas savoir qu’on la possède. Puis retournez-la en tous sens dans votre esprit. Mettez, si vous le voulez, au compte de l’intuition votre premier coup d’oeil dans l’inconnu, mais faites les contrôles et les rectifications nécessaires. Soumettez les abstractions à l’épreuve de l’expérimentation afin d’apprendre comment leur faire prendre corps.

Utiliser l’acquis

On rencontre des personnes qui font grand mystère de la source des idées auxquelles ils doivent leur réussite. Roger Bacon a énoncé sa formule de la poudre à canon sous la forme d’un cryptogramme latin. Certains écrivains attribuent leurs oeuvres à une étincelle divine. Des hommes d’affaires rapportent leurs coups de maître à une lueur d’inspiration. Pourtant, ces idées ne leur seraient pas venues s’ils n’avaient pas au préalable meublé leurs esprits de connaissances utilisables par l’étude. Une idée ne trouve guère où se percher dans un cerveau vide.

Au moment où vous prenez votre stylo pour rédiger une lettre, un article ou une communication savante, vous avez déjà réuni beaucoup de petites choses qui vont vous être utiles. Vous avez lu les détails de la question, étudié les cas analogues, rassemblé les faits et contrôlé leur exactitude, cherché dans votre mémoire des exemples et des événements appropriés, parcouru les livres et les documents se rapportant à votre sujet, et vous avez groupé tout cela sous forme de notes faciles à consulter.

La recherche ne consiste pas à scruter l’inconnu au hasard dans l’espoir de tomber sur quelque chose d’utile ou intéressant. C’est un état d’esprit, une façon ordonnée de découvrir les éléments composants d’une idée, de décider s’il vaut la peine d’y travailler, de prévoir ce qui peut en résulter, puis de s’attaquer aux détails avec patience et ténacité. Si la contribution de Bacon au progrès des sciences a été si précieuse, c’est qu’elle était une révolte contre les renseignements de seconde main. Sa méthode consistait à rechercher les faits.

Viser en tout à la simplicité

En démontrant par une expérience effectuée au laboratoire et sur le campus de l’Université McGill que le rayonnement pénétrant détecté dans l’atmosphère ne provenait pas de la surface de la terre, Sir Ernest Rutherford (dont le tombeau se trouve à l’abbaye de Westminster) révéla l’existence des rayons cosmiques. On lui doit aussi les premières expériences réussies concernant la fission nucléaire. En 1908, il méritait les prix Nobel de physique et de chimie. Dans ces travaux de recherche et d’expérimentation, Rutherford utilisa des appareils d’une simplicité telle que l’on ne peut guère parler de ce savant sans y faire allusion.

Une petite idée, insignifiante en soi, comme celle de frotter un morceau d’ambre et de s’en servir pour attirer des pailles, peut croître et se développer au point de changer la face de la terre et les habitudes des peuples. Thalès de Milet, l’un des sept sages de la Grèce, fut le premier à remarquer ce phénomène, qui devait à la suite d’expériences nombreuses et variées aboutir à la mise au point de la télévision 2,523 ans plus tard.

Le grand obstacle qui se dresse entre la conception d’une idée et la suite qu’on y donne est l’inertie mentale. Ce ne sont pas les esprits indolents, obtus et indifférents qui dégagent les grandes pensées des petites idées, mais ceux qui sont actifs, sérieux et inquisiteurs.

David Fife eut l’heureuse idée de rechercher une variété de blé qui aurait le temps de mûrir pendant la courte saison de culture de l’Ouest. Ayant réussi à se procurer un petit sac de blé en Europe, il s’empressa d’en semer le contenu dans sa ferme de Peterborough en Ontario. Trois grains seulement germèrent, et une vache en mangea un. Les deux autres vinrent à maturité dix jours plus tôt que le blé qu’il avait semé jusque-là. La troisième année, il en récolta un boisseau, qu’il expédia dans l’Ouest. Ce blé s’y révéla vraiment hâtif, et l’initiative et le patient travail de Fife permirent d’ouvrir les provinces des Prairies à l’agriculture.

L’invention

Peu de personnes commencent leur carrière comme inventeurs. L’étudiant qui sort de l’école en exhibant avec fierté son parchemin ne se met pas tout de suite à fabriquer de nouveaux antibiotiques, des moteurs d’automobile non polluants ou des engins spatiaux. Toutes ces choses ont d’abord existé à l’état de petites idées, que quelqu’un a eu la sagacité de percevoir et de saisir, l’intelligence de comprendre et le bon sens de mettre au point.

Les idées dorment parfois pendant longtemps avant qu’un ramasseur de petits riens ne s’avise d’en découvrir les possibilités. Les personnes les plus intelligentes elles-mêmes ne s’arrêtent pas toujours aux menus événements qui portent en eux le germe de la grandeur.

Dans son célèbre ouvrage La Richesse des nations, publié en 1775, Adam Smith ne consacre qu’un court alinéa à l’industrie cotonnière, alors que sir Richard Arkwright avait déjà ouvert sa filature révolutionnaire depuis six ans. John Evelyn écrivait dans son Journal, le 12 avril 1682, qu’il avait dégusté un souper où tout avait été cuit dans des marmites de Papin, mais ce n’est qu’au XXe siècle que l’usage de l’auto-cuiseur devait se répandre dans les ménages.

Inventer c’est réaliser quelque chose d’inédit. Il peut s’agir d’une chose entièrement nouvelle ou d’une meilleure façon de procéder, ou encore du réagencement des parties d’un appareil en vue d’en utiliser toutes les possibilités.

Dans les premières machines à vapeur, des petits garçons étaient chargés d’ouvrir et fermer la communication entre la chaudière et le cylindre. Mais l’un de ces enfants remarqua un jour qu’en attachant au balancier de la machine avec une ficelle le robinet de réglage de cette communication, celui-ci s’ouvrait et se fermait sans son intervention.

L’inventeur de la machine à coudre, Elias Howe, connut le succès en mettant le chas et la pointe à la même extrémité de l’aiguille, ce qui nous valut le point de navette.

Les petits gaspillages font boule de neige

Dans une usine comme dans une cuisine, l’élimination du gaspillage est l’une des fonctions de la direction. Il n’est pas nécessaire qu’une fuite soit très considérable pour causer une perte appréciable. Un gaspillage de un pour cent dans le cas d’une marchandise coûtant $100 exige qu’on la rende cent fois pour se rattraper.

Les gens intelligents doivent déclarer la guerre au gaspillage. Épargner un peu de temps par-ici, un petit effort par-là et un peu de matière première à l’atelier ou au foyer se traduit en fin de compte par des économies notables.

Il faut de la réflexion pour découvrir les menues prodigalités qui grignotent nos revenus. Selon un rapport du Service des produits alimentaires des États-Unis, la population de ce pays jette chaque année pour plus de 20 millions de dollars de restes de cuisine.

Le temps n’est pas moins important que les choses. Il est fait de secondes qui, tout en étant très brèves, forment 8,760 heures par an. Après avoir travaillé, dormi, mangé et vaqué aux occupations courantes, il nous reste quelque 2,400 heures dont nous pouvons disposer à notre gré. Pourtant, dit un auteur, le prétexte que nous gaspillons presque tous le plus de ce temps si précieux à invoquer pour nous excuser de notre manque d’effort et de progrès est que « nous n’avons pas le temps ».

Nous devons extirper de nos vies les petits gaspillages de temps de toutes sortes. Si nous perdons cinq minutes par jour pour trouver un objet mis à la mauvaise place, nous aurons dissipé trente heures à la fin de l’année.

Pour faire le meilleur usage de son temps et avoir ainsi l’occasion de chercher, de trouver et d’approfondir des idées, il n’est pas nécessaire d’établir un horaire rigide. Tout ce qu’il faut, c’est de repérer les petites périodes de temps qui se perdent dans notre journée, puis de les occuper à quelque chose d’important.

S’il est fort bien de veiller à tirer parti des petites choses, il importe d’autre part de se garder de perdre son temps et son énergie à des bagatelles. Ceux qui ont l’habitude de découvrir et d’élaborer des idées sont trop absorbés par ce travail agréable pour s’occuper de futilités. Ils savent discerner entre ce qui mérite considération et ce qu’il faut écarter comme sans importance.

Petites causes, grands effets

Les petites choses influent souvent sur le cours de l’histoire. « Un simple soldat, un enfant, une fille à la porte d’une auberge, dit Edmund Burke, ont changé la face du destin et peut-être celle de la Nature. »

Parlant de Clio, la muse de l’Histoire, John Buchan (plus tard le baron Tweedsmuir et gouverneur général du Canada) écrivait : « Je me la représente le plus facilement avec la mine intriguée et curieuse d’un enfant, les yeux braqués sur le kaléidoscope des siècles et riant – oui, riant – d’une inconséquence qui défie la logique et de bizarreries dépassant ce que l’art a de plus fantasque. »

L’histoire est remplie de petites choses capitales : l’accident qui laisse la vie sauve à un personnage prédestiné ; les conditions atmosphériques qui décident de l’issue d’une bataille ; le rigoureux hiver de 1788 qui entraîna la famine de 1789 et peut-être la Révolution française ; une idée soudaine qui inspire une grande invention.

Au cours d’une émission de télévision présentée en 1972, un commentateur affirmait que s’il n’avait pas plu le jour de l’ouverture du Parlement, en 1936, le roi Edouard VIII n’aurait peut-être pas abdiqué. Selon ce commentateur, le roi avait espéré qu’une foule nombreuse de partisans borderait le parcours du cortège royal, ce qui aurait amené le gouvernement à changer d’avis et à le laisser épouser Mme Simpson, mais seules quelques personnes bravèrent le mauvais temps.

Pour un simple chavirement, Louis Jolliet se vit privé du titre public de premier explorateur du Mississipi. Il était déjà en vue de Montréal, au retour de son expédition, lorsque son canoë chavira au pied des rapides de Lachine et que ses notes furent emportées par les eaux.

Réussir dans la vie

Chacun s’efforce tant bien que mal de comprendre la vie et de s’accommoder de la place qu’il y occupe. Or, cet objectif exige que l’on soit attentif aux petites choses.

La vie est une longue série d’options qui s’offrent à notre sens des valeurs, à notre jugement de ce qui est important et ce qui ne l’est pas, et à notre perception de ce qui est grand et de ce qui est petit. Pour vivre, l’homme doit agir ; pour agir, il doit faire des choix ; pour faire des choix, il doit tenir compte des valeurs ; et les valeurs se fondent sur de petites choses.

La manière d’envisager les valeurs dépend de la personnalité de chacun. Prenons, par exemple, notre mode de vie canadien. Il est fait d’une multitude de petites choses dont aucune ne peut être retranchée sans détruire l’unité de la mosaïque. Aux yeux de certaines personnes ces petites choses nous divisent en suscitant entre nous des rivalités ; d’autres les considèrent comme les fragments d’un tout d’une grande beauté. Comme la crainte, la haine et l’envie d’une part, la confiance, l’amour et le partage d’autre part sont une foule de petites choses.

Le tact, l’une des qualités indispensables pour réussir dans les affaires et la vie sociale ne tient-il pas lui aussi à de petites choses. Il procède à la fois de l’esprit et du coeur. C’est un sentiment délicat des convenances, du bon goût et du beau.

Un petit geste de courtoisie élève son auteur au-dessus du vulgaire, tout comme un tantinet de bonté compréhensive. Un petit compliment ou une pincée d’éloges favorise le bon vouloir et met du soleil dans la vie de celui qui donne comme de celui qui reçoit. Un chant de Noël ne nous parle-t-il pas du petit tambour qui n’avait d’autre cadeau à offrir qu’un rataplan de son instrument, mais dont il fut remercié par un sourire.

On se demande souvent comment les personnes qui occupent des hauts postes dans les affaires, les professions libérales, les arts, la politique et la société y sont parvenues. Dans l’immense majorité des cas, en sachant discerner les petites occasions favorables, en prenant l’initiative de les saisir et en déployant l’énergie nécessaire pour les exploiter. Il suffit tout simplement d’avoir le désir de créer, la volonté d’agir et la force de persévérer.

Les hommes et les femmes vraiment compétents ont appris à profiter des petites choses – brefs instants, petites idées, menus avantages – et à en tirer tout le parti possible.

« Les petites choses, a dit Michel-Ange, font la perfection, et la perfection n’est pas une petite affaire. »