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Il est difficile à certaines personnes de concilier l’art avec les réalités pratiques que sont leur travail journalier et le tohu-bohu de la politique nationale et mondiale.

Si, à la vérité, le train-train quotidien et l’agitation sont aux antipodes des arts, ce n’est pas une mauvaise chose. Dans notre civilisation actuelle, il est nécessaire que les arts fassent contrepoids à la mécanisation et à l’industrialisation si nous voulons conserver notre équilibre, notre culture et notre santé d’esprit.

L’art a le pouvoir de représenter le chaos, l’éventuel, l’embrouillamini de la vie de chaque jour selon les lois de la simplicité, de la symétrie et de la perspective. Il est, pour ainsi dire, le témoignage qui nous fait percevoir, entre les lignes des manchettes criardes, que la beauté, la vérité et la bonté ne sont pas démodées.

Il ne faut pas juger les arts d’après les normes de l’efficacité industrielle et de son souci de la production en série. À la différence des choses utiles ou des outils employés pour les fabriquer, les oeuvres d’art n’ont d’autre rôle à remplir que celui de procurer de l’agrément. Selon le code utilitariste, la création des choses belles est le passe-temps des personnes que l’on pourrait affecter à un travail utile.

Chacun sait qu’il y a des choses que nous faisons par nécessité, d’autres que nous faisons par obligation morale et d’autres enfin que nous faisons par plaisir ou pour nous distraire et qui sont la contrepartie nécessaire de toutes les autres.

L’influence humanisante de l’art est l’une des forces les plus positives dans l’acquisition d’un esprit bien équilibré ; elle nous aide à affronter et à dominer la multitude des affaires matérielles et mondaines qui absorbent la majeure partie de notre attention et de notre temps.

Certains condamnent l’art contemporain et invoquent le dégoût qu’il leur inspire pour ne pas en tenir compte.

On ne peut louer l’art ni lui reprocher d’être le miroir de la société dans laquelle il existe. Si la réalité est chaotique, son image le sera aussi. Si elle est déroutante et difficile, le peintre pourra l’idéaliser ou, comme on dit dans le métier, n’en exprimer que l’âme.

Ce qu’est l’art

Au dire de certains, l’art est authentique lorsqu’il révèle de solides connaissances, du métier, une imagination vive, un jugement sain, de la véracité et une signification intelligente. Selon d’autres, le caractère distinctif d’une oeuvre d’art est de ne servir à aucune fin pratique, mais d’être une fin en soi. D’autres encore prétendent qu’une peinture qui ne charme que par l’idée qu’elle exprime, ce n’est pas une ouvre d’art mais une illustration. Le critère fondamental de valeur consiste à se demander si la chose procure du plaisir. Exciter en nous un sentiment de jouissance, de soumission au beau, voilà la véritable fin de l’art.

Dans son essai sur l’art, Tolstoï écrit : « L’art est une activité humaine qui consiste en ce qu’un homme transmet sciemment aux autres, au moyen de certains signes extérieurs, des sentiments qu’il a vécus et en ce que les autres, gagnés par ces sentiments, les éprouvent eux aussi. »

L’art dont il est question ici peut être goûté par les petits et les grands, par les lettrés et les illettrés, si le coeur leur en dit.

Que le sens de la beauté est naturel à la plupart des humains, quelle que soit l’étendue de leur instruction, nous en avons la preuve dans l’art des peuples primitifs. Nous en trouvons aussi un exemple dans l’appréciation esthétique que manifeste inconsciemment l’homme ordinaire d’aujourd’hui en regardant les derniers modèles d’automobiles ou à la vue d’une belle machine qu’on ne lui demande pas de regarder comme « une oeuvre d’art ».

Beaucoup de personnes avouent que leur attitude envers l’art est purement émotive et inexperte, mais qu’elles n’en éprouvent pas moins du plaisir. Si quelqu’un ne se sent pas profondément troublé devant les grands tableaux, les grandes sculptures ou la grande musique, il peut être certain de vivre une vie énormément moins élevée et plus limitée que celle qu’il pourrait connaître. Le monde artificiel n’est qu’une création de l’homme, mais le monde réel est un monde riche de profondes émotions.

La beauté, besoin universel

Il faudrait que le sens esthétique soit intentionnellement et consciemment cultivé dans tous les secteurs et toutes les activités de la vie. Nous sommes tous trop exposés à nous développer dans une de nos facultés aux dépens d’autres dons, plus personnels, de notre nature. Les cadres d’élite, les spécialistes en électronique, les concepteurs d’ordinateurs sont tous des hommes d’une grande vigueur intellectuelle, mais beaucoup d’entre eux ne se sont pas souciés de conserver ni de former leur vraie personnalité, leur sentiment du beau.

Étant admis que les beaux-arts sont ceux qui ont pour objet la beauté, la question se pose de savoir ce qu’est la beauté. On ne peut la réduire à certaines lois générales applicables à tous et en tout temps. Chacun doit se créer une théorie à lui de la beauté et faire sa propre appréciation de ce qui est beau.

Il n’y a pas d’échelle absolue et reconnue de la beauté, et certaines personnes discernent plus facilement que d’autres certaines formes de beauté. Les fines sculptures en bois du Canada français de même que les sculptures esquimaudes se comprennent plus rapidement et plus aisément que les figurines de glaise chinoises du Royal Ontario Museum, mais il y a dans toutes de la beauté.

À propos de beaux-arts, on peut dire que tout objet matériel dont la seule contemplation des qualités extérieures nous procure du plaisir est beau dans une certaine mesure. Lorsque nous disons qu’il y a de la beauté dans une peinture ou dans une sculpture, ce que nous entendons par là en réalité c’est que cet agencement particulier de couleurs et de formes suscite en nous un état d’esprit agréable.

Notre appréciation de la beauté est en grande partie influencée par les conditions dans lesquelles nous voyons l’objet, de même que par notre tempérament personnel. Tel qui parle en poète de la rougeur de la rose, s’évanouira devant la rougeur du sang coulant d’une blessure.

À la portée du plus grand nombre

Les beaux-arts sont descendus des hautes sphères où les avaient placés les religions et les sociétés classiques, et ils connaissent aujourd’hui une intéressante carrière séculière et démocratique.

L’expression « beaux-arts » désigne normalement les arts qui ont trait aux lignes, aux couleurs et aux formes (peinture, sculpture et architecture) ; aux sons (musique) et à l’exploitation de la valeur musicale et expressive des mots (prose et poésie). L’architecture, la sculpture, la peinture, la musique et la poésie sont, de l’aveu de tout le monde, les cinq principaux beaux-arts.

On peut exercer les arts mécaniques par la stricte adhésion à la règle et au précepte, mais les beaux-arts, même s’ils ont des bases techniques qui sont également matière de loi et de précepte, ne peuvent s’exercer qu’en suivant, dans un domaine situé au-dessus de la règle et du précepte, la libre impulsion des plus hautes facultés de l’esprit. Ils exigent l’imagination nécessaire pour, comme dit Aristote, donner l’existence à quelque chose.

L’oeil de l’artiste voit certes la surface des choses, mais il en perçoit aussi et il en interprète la structure organique et la richesse sous-jacente. C’est lorsqu’une oeuvre d’art réalise une synthèse de tous ces éléments qu’elle devient pour nous un moyen de compréhension et qu’elle révèle une profusion de beauté culturelle.

L’art ne peut exister sans communiquer. Il doit à la fois avoir une forme et une signification. Il ne suffit pas qu’une oeuvre ait un sens spécial pour l’artiste : elle doit transmettre un message ou un sentiment au spectateur.

L’artiste qui peint un paysage ne cherche pas à en reproduire l’aspect visible, comme le ferait une photographie, mais à nous en dire quelque chose, à nous faire part d’une découverte originale qu’il a faite et qu’il désire nous communiquer.

Voilà pourquoi on ne regarde pas une oeuvre d’art comme on regarde une illustration. Nous n’y recherchons pas une exactitude photographique, mais la représentation d’une tranche de vie qui est intelligible, informative et même édifiante.

La Cène

L’artiste coordonne divers éléments et les regroupe en une unité, où chaque élément est relié au tout, afin de faire comprendre son idée. La bordure de sa toile marque la limite de sa peinture. Il doit rapporter tout ce qu’il peint aux dimensions et à la forme qu’il a choisies, et chaque objet doit être en connexité précise avec les autres objets.

Nous en trouvons un exemple dans la Cène de Léonard de Vinci, qui est probablement le tableau le plus célèbre du monde. Ce chef-d’oeuvre illustre un moment d’un drame humain sans pareil, et l’artiste fait concourir chaque élément de sa composition à le communiquer. Il met à contribution les détails architecturaux de la pièce ; des lignes irradiant des chevrons du toit convergent vers la tête du personnage principal ; les autres personnages sont disposés, selon un plan ondoyant, de façon à orienter le courant d’émotion vers le centre de la table où il semble se briser contre la sérénité de la figure dominante.

Un tableau ne saurait nécessairement représenter toutes les possibilités optiques imaginables. Il faut même veiller à ne pas accentuer les particularités, ce qui créerait de la confusion. La représentation d’un immeuble où chaque brique serait reproduite avec la plus grande fidélité ne laisserait aucune place à la poésie dans la conception du sujet par l’artiste.

L’art est une réponse au besoin de stimulation de nos sens et de notre imagination, et la vérité n’y a part que dans la mesure où elle sert à atteindre à cette fin.

La vérité dans l’art revêt presque autant d’aspects que dans la morale ou la philosophie. Le peintre peut l’interpréter comme vérité d’effet général, quitte peut-être à négliger la vérité de détail. Tout le monde n’accorde pas à l’artiste ou au poète le droit de subordonner la réalité à son point de vue ou de supprimer certaines formes extérieures afin de révéler la vérité profonde et simple comme il la perçoit.

Notre premier noël canadien, par exemple, est l’adaptation d’un ancien récit à l’intelligence, au milieu et à la façon de vivre des Hurons de la baie Georgienne il y a 300 ans. Il a été écrit par le père Jean de Brébeuf en dialecte amérindien.

Les illustrations sur diapositives faites pour ce noël par l’Office national du film sont conformes au contexte des paroles : « une hutte d’écorce » au lieu d’une « étable » ; un « maillot de peau de lapin » au lieu de « langes » ; des présents de « peaux de renard et de castor » au lieu de l’« or, l’encens et la myrrhe. »

Ce qui plaît à l’oeil

Les beaux-arts s’adressent non seulement à l’oeil mais aussi à l’imagination. L’oeil observe dix qualités différentes des objets : la lumière et l’obscurité, la couleur et la matière, la forme et la position, la distance et la proximité, le mouvement et l’immobilité. C’est par leur représentation dans son oeuvre que l’artiste atteint notre esprit et anime nos pensées.

Beaucoup de tableaux doivent leur valeur permanente et leur principal attrait à nos yeux à l’excellent sens de la ligne de l’artiste ainsi qu’à son talent et à ses dons de dessinateur. D’autres nous plaisent par la richesse ou l’harmonie des couleurs ou par la finesse des effets de lumière. L’oeil humain se lasse des lignes droites mécaniques. La courbe demeure la ligne esthétique, dans les draperies du portrait comme dans le profil d’un paysage ou des vagues de l’océan.

C’est peut-être dans l’expression des effets de la distance que l’art du paysagiste est le plus durement mis à l’épreuve. La perspective, a dit Léonard de Vinci, est le frein et le gouvernail de la peinture, mais certains peintres abstraits y ont renoncé. Ils cherchent à souligner l’indépendance du monde qu’ils créent des lois qui régissent l’apparence dans la réalité naturelle.

L’architecture, une science et un art

La substance des rêves d’un artiste est plus facile à évoquer avec de la couleur sur une toile que dans la brique et le béton. L’architecture est le plus grand et le plus compliqué de tous les arts, car elle est à la fois un art et une science. C’est grâce à elle que s’érigent et s’agrémentent les bâtiments qu’élève l’homme, et nous demandons à ces constructions de réunir deux sortes de qualités, savoir de bien remplir leur rôle pratique et d’être d’aspect gracieux et agréable.

Les gens d’aujourd’hui exigent que l’architecture soit pratique. Si Phidias, le célèbre statuaire d’Athènes, était chargé de diriger la construction d’un Parthénon pour orner le sommet du Mont-Royal à Montréal, ou encore Signal Hill à Saint-Jean ou le mont Grouse à Vancouver, il y aurait sans aucun doute une manifestation de la part des citoyens pour demander pourquoi on n’a pas retenu ses services pour quelque chose d’utile, la construction d’un groupe d’habitations par exemple.

L’architecte qui crée des églises ou des immeubles à usage de bureaux élimine les ornements hérités des styles anciens parce qu’on ne peut les considérer comme la juste expression de notre époque. Il doit tenir compte du milieu ambiant, de la destination du bâtiment, du style des constructions voisines, des conditions climatologiques et du coût.

On évite l’enjolivement. La beauté est cubique et sévère. La forme rectangulaire prévaut même pour les tuyaux de décharge des eaux pluviales et les robustes statues masculines qui supportent les gouttières de la basilique Saint-Marc à Venise n’ont plus leur place dans l’architecture moderne.

Pourtant, pour laisser un souvenir agréable dans la mémoire, un bon immeuble doit avoir une physionomie remarquable et non seulement du volume et de la hauteur. Il faut que par l’emploi de certaines intersections frappantes l’architecte ménage à l’oeil des points de concentration et de repos.

En plus de la peinture, de la sculpture et de l’architecture, il existe plusieurs autres moyens d’expression du sens artistique. Historiquement, la poterie compte parmi les arts les plus anciens. C’est le plus élémentaire, mais aussi le plus difficile parce que le plus abstrait.

Chez les tribus primitives, la vannerie et le tissage, arts industriels en ce sens qu’ils étaient orientés vers l’utilisation, étaient pratiqués par des artisans qui s’efforçaient d’allier la beauté à l’utilité.

L’industrie mécanique du métier du tisserand suppose l’art admirable du dessinateur qui conçoit les motifs. Les tapisseries médiévales nous laissent parfois pantois. Ces symboles de richesse des personnages royaux, en laine ou en soie nuancée et en fils métalliques, sont pleins de fantaisie et d’esprit.

L’évolution de l’art

L’évolution de l’art, à notre époque, est plutôt déroutante pour le profane, qui a un peu l’impression d’être un rêveur passant insensiblement d’un rêve à un autre. Chaque civilisation crée son style artistique particulier, mais on y discerne toujours quelques bribes des siècles antérieurs.

L’art change de point de vue, comme tant d’autres choses dans la vie. Il est l’expression d’une époque, parfois même une révolte contre la civilisation de l’époque. Une génération dédaigne ce que la précédente applaudissait ; pourtant ce serait une grave erreur de penser que le goût du jour est toujours le meilleur.

Ce que l’on présente comme l’art d’aujourd’hui peut fort bien être l’image des conceptions tourmentées ou agressives de la vie que professe l’homme moderne. L’artiste se rend compte que la vie, en particulier la vie psychique, existe sur deux plans : l’un déterminé et visible dans sa configuration et ses détails, comme la portion émergée d’un iceberg ; l’autre, soit la majeure partie de la vie, immergé, vague et indéterminé.

Le but que vise l’artiste évolué est de comprendre et d’exprimer certaines des dimensions et des caractéristiques de l’être immergé de l’homme, et, pour y arriver, il a recours à diverses sortes de symbolisme. Cela présente une énorme difficulté pour l’amateur d’art ordinaire. Même si l’on possède ce qu’on pourrait appeler le « point de vue moderne », il n’en faut pas moins s’initier petit à petit à ce monde de formes étranges.

Peut-être l’art moderne atteint-il à son plus haut degré d’innovation lorsqu’une peinture ou une sculpture est elle-même le centre d’attraction, c’est-à-dire qu’aucun objet ne lui a servi de modèle ou de point de départ.

Dans certains milieux, ce procédé est presque devenu un culte de la non-signification, ce qui ne dit rien évidemment à l’homme de la rue. Si le message ne peut être déchiffré que par ceux qui en connaissent la clef ou le code, l’ensemble du public demeure confondu.

En regardant la collection

Pourtant, quiconque veut se cultiver et comprendre la vie doit apprendre à connaître les ouvres des artistes d’aujourd’hui comme celles des grands maîtres d’autrefois.

Il importe d’aborder une exposition d’art sans idées préconçues. Même si l’on ne se sent pas de l’attrait pour toutes les pièces de la collection, on pourra au moins apprécier d’admirables qualités.

Les apprentis peuvent s’initier à une grande partie de la technique en étudiant, les yeux sur la toile, les coups de pinceau d’un maître, mais le trait essentiel de l’oeuvre de l’artiste réside dans ses caractéristiques qui échappent aux règles, aux préceptes, aux mesures et autres lois et secrets communicables. À quelqu’un qui regardait de trop près une de ses peintures, Rembrandt faisait remarquer que « les tableaux sont faits pour être regardés et non pour être flairés ».

Faut-il, pour admirer et apprécier les chefs-d’oeuvre de l’art, visiter la Galerie Nationale à Ottawa, le Musée Metropolitan à New York, le Louvre à Paris ou le Palais Pitti et les églises de Florence ? Absolument pas.

Des châteaux, des cathédrales et des musées où il était claquemuré, l’art a été répandu dans le monde pour l’agrément de tous. Même si le fait de répartir les ouvres d’art dans un plus grand nombre de lieux ne suffit pas pour faire de nous tous des esthètes, il nous offre la possibilité de goûter ce qui jadis était le privilège d’une minorité.

On trouve des galeries et des musées d’art dans chaque province. Des entreprises commerciales et industrielles exposent des oeuvres d’art, dont certaines sont dues à des artistes canadiens et d’autres importées de l’étranger. On peut se procurer à peu de frais des reproductions des meilleurs chefs-d’oeuvre.

Il ne convient pas d’aborder l’art ou de s’y aventurer sans préparation. On dit souvent que c’est le spectateur qui voit le mieux le match, mais cela ne lui servirait pas à grand-chose s’il ne connaissait pas les règles du jeu. L’acuité de notre perception et de notre jugement dépend de la richesse de notre savoir. Plus nous pouvons faire de comparaisons, mieux nous sommes en mesure d’apprécier l’art et d’émettre des opinions.

S’essayer à l’expression de soi

Presque tout le monde a la capacité de s’exprimer dans une forme d’art quelconque. Il est possible que votre oeuvre ne soit pas digne de figurer dans une exposition, mais sa création vous aura procuré du plaisir même si vous la dissimulez dans un placard.

La peinture, la sculpture, la céramique, les travaux à l’aiguille apportent le délassement de l’esprit à des milliers d’hommes et de femmes qui s’y livrent avec assez de sérieux pour être fiers du produit de leur travail. Il apprennent ainsi à envisager la vie d’une façon originale et expressive de leur personnalité.

On peut étudier la technique propre à un art en suivant les cours du jour ou du soir qu’offrent les services d’éducation permanente des universités, les groupes d’enseignement des adultes, les associations locales, etc. Indépendamment de ce que produisent les élèves qui suivent des cours de peinture, de sculpture, de céramique ou d’un autre art dans une salle paroissiale, une salle de classe ou un foyer, l’esprit de camaraderie qui s’établit entre eux est quelque chose d’appréciable.

L’art est utile parce qu’il élève l’âme de l’homme à un palier supérieur à celui de la simple existence. Il comporte des activités que l’on exerce non pas par besoin, mais par amour. À une époque où le matériel a une telle importance et une influence si profonde sur l’esprit des gens, il importe plus que jamais de pouvoir rechercher la détente que procure l’activité esthétique. C’est un excellent moyen de s’évader de l’arbitraire de la vie.

Tel artiste suivra son étoile, tel autre sa flammerole. Mais l’un et l’autre sont des membres de la société ainsi faits qu’ils ressentent plus vivement que les autres certaines catégories de plaisirs que chacun de nous peut ressentir à son niveau. Leurs talents ne sont pas utiles dans le sens où le sont ceux du plombier, du routier, du mécanicien d’auto ou du programmeur sur ordinateur. Mais s’ils parviennent à tirer de leurs méditations sur l’incohérence tentaculaire de la vie une expression cohérente de normalité, ils auront rendu un service très précieux pour leur tranquillité d’esprit et celle des autres.

L’amour de l’art nous délivre de notre claustrophobie et élargit notre horizon. Il nous aide à nous élever au-dessus des banalités de l’existence et à en surmonter l’agitation. Son but n’est pas de nous permettre de nous évader de la vie, mais d’accéder à une vie de plus grande envergure.