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Bien qu’il compte à peine un pour cent de la population mondiale, le Canada occupe une place d’honneur dans nombre de sphères de l’activité humaine. Voici une brève liste de nos titres de fierté et des réalisations qui ont fait de nous l’un des peuples les plus admirés de la planète…

Du fond des abîmes où l’économie canadienne a parfois été contrainte de ramper, on a souvent entendu des voix cruelles railler la prédiction de sir Wilfrid Laurier : le XXe siècle appartiendra au Canada. Les méchantes langues devront se chercher une autre tête de Turc, car l’histoire semble vouloir donner raison au septième premier ministre de notre pays.

Elle le fait par l’entremise d’une éminente autorité : l’Organisation des Nations unies. Depuis quelques années, en effet, l’O.N.U. évalue le degré d’avancement de ses 186 membres d’après un indice du développement humain fondé non seulement sur la richesse matérielle, mais aussi sur des indicateurs sociaux comme le niveau moyen de scolarisation, l’état de santé et l’espérance de vie de la population. En 1995, le Canada s’est classé premier pour la troisième fois, damant le pion à la Suisse et au Japon. Mesure impartiale du bonheur humain, l’indice onusien est une preuve éclatante de l’incomparable qualité de vie dont jouissent les Canadiens.

Toujours en 1995, une autre étude indépendante a établi que le Canada est le pays le plus riche de la planète après l’Australie. La Banque mondiale a totalisé le capital humain et matériel de 192 pays pour arriver à ce classement global des patrimoines nationaux.

A l’aune du revenu annuel par habitant, notre pays rétrocède certes au 16e rang, mais il faut voir que cela reste quatre fois supérieur à la norme mondiale.

Malgré une série de crises économiques très douloureuses, le Canada a su exalter l’ambition et combler les aspirations de millions de gens. Depuis 1920, le revenu moyen en dollars constants y a doublé, non pas une, mais deux et trois fois.

L’argent ne fait pas le bonheur, mais il rend la vie plus facile : les Canadiens jouissent ainsi d’une abondance matérielle inimaginable dans la plupart des pays en voie de développement. Posséder sa maison est chose si courante que cela semble quasiment un droit – et cette maison est d’ordinaire spacieuse et confortablement meublée. Il en va de même des autres symboles de l’aisance : voiture, électroménagers, équipements récréatifs, etc. Pas moins de 98 p. cent des foyers ont la télévision en couleurs, 79 p. cent, un four à micro-ondes, 23 p. cent, un ordinateur et 52 p. cent, un barbecue au gaz.

Les heureux propriétaires de ces barbecues peuvent y faire griller de succulents morceaux de boeuf sans se ruiner, car on mange – et on s’habille – bien à bon compte au Canada, notamment par rapport aux pays avancés d’Europe.

Rien d’étonnant que nous soyons en si bonne santé ! Selon la Banque mondiale, il n’y a que les Japonais pour vivre plus longtemps que nous. Le Canada occupe en outre l’avant-dernière place au tragique tableau de la mortalité infantile (quatre pays se partagent la dernière).

Les statistiques de l’O.N.U. révèlent encore que notre richesse collective est largement répartie : seuls cinq pays nous devancent à ce chapitre. La pauvreté, ce fléau que rien ne semble en mesure d’éradiquer, frappe encore environ un million de ménages, mais beaucoup plus nombreux sont ceux qui disposent d’un revenu de 70 000 $ et plus par an. Grâce aux 42 p. cent de femmes travaillant à l’extérieur du foyer, la famille canadienne moyenne jouit d’un revenu supérieur à 52 000 $ par an.

Le Canada est l’un des pays qui consacrent les plus forts pourcentages de leur revenu national aux services sociaux, principalement la santé et l’éducation. Nous investissons dans la formation plus d’argent que toute autre nation exception faite de la Finlande et de la Suisse, ce qui nous vaut la plus haute proportion de diplômes postsecondaires du monde industrialisé : selon l’Organisation pour la coopération et le développement économiques, 41 p. cent des Canadiens de 25 à 64 ans ont un diplôme collégial ou universitaire. Or, l’éducation loue un rôle crucial dans la promotion sociale.

Relever le défi du terrain, du climat et de la distance

Obnubilés par la crise des finances publiques et les autres problèmes qui nourrissent un chômage aigu et leur imposent de pénibles compressions budgétaires, les Canadiens s’arrêtent rarement à mesurer le chemin parcouru depuis la Confédération. Le pays qui a vu le jour il y a 129 ans n’avait presque pas d’industrie, encore moins de capital; il est aujourd’hui la septième économie du monde.

Au sein du Groupe des Sept, il côtoie les plus grandes puissances de la planète, Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni et Italie. Au classement démographique, sa population de moins de 30 millions d’habitants le renvoie pourtant au 29e rang mondial, entre la Colombie et le Maroc. Comment a-t-il réussi à se hisser au niveau de géants européens deux fois plus peuplés que lui, sinon davantage ?

La géographie explique une part du mystère. Le Canada a pour voisin le plus riche marché de la planète et entretient avec lui un vigoureux libre-échange : les États-Unis achètent 80 p. cent des marchandises que nous exportons et diffusent dans notre tissu industriel le meilleur de leur savoir-faire technique et de leur science de la gestion. Grâce à quoi nous sommes l’une des principales nations commerçantes du globe et nous bénéficions d’une monnaie stable, acceptée partout, qui nous permet de voyager en grand nombre de par le monde et d’en importer les produits les plus variés.

L’immensité même du territoire, qui ne le cède en superficie qu’à celui de la Russie, s’est avérée avec le temps un atout plutôt qu’un obstacle grâce aux efforts de ceux qui ont osé relever le double défi de la distance et du climat.

A peine cinq p. cent de la terre canadienne est propre à la culture, mais cela représente une telle surface que l’agriculture est l’un des piliers de notre commerce international. Appliquant à la vaste prairie qui représente les quatre cinquièmes de notre potentiel agricole des méthodes développées spécifiquement pour elle, les producteurs canadiens de blé et d’oléagineux se sont hissés parmi les premiers exportateurs du monde. Et ce n’est pas tout : le sous- sol de cette terre bénie recèle en effet d’extraordinaires gisements de pétrole, de gaz, de soufre et de potasse. Plus à l’ouest, les vallées de la chaîne côtière produisent les montagnes de charbon qui chauffent et éclairent l’Asie. L’âpre Bouclier canadien est un authentique coffre aux trésors qui alimente l’industrie en minerais, en bois et en hydro-électricité à prix d’aubaine.

Pour transformer l’obstacle géographique en atout économique, le Canada a dû former une armée de spécialistes des transports, des communications et du génie civil qui transmettent aujourd’hui au monde entier le savoir acquis sur le territoire national : les porteurs d’eau de naguère se sont mués en experts-conseil. Nous exportons encore du bois, mais vendons de plus en plus d’avions et de matériel de télécommunications. Tout cela d’une qualité égale à ce qui se fait de mieux dans le monde.

Notre investissement financier et humain dans les domaines de pointe ne cesse de croître : entre 1986 et 1993, la production des industries de haute technologie a progressé de quelque 16 p. cent, celle des branches anciennes, d’à peine 1,3 p. cent. Le Canada est l’un des chefs de file de la révolution informatique; son industrie du logiciel a grandi d’environ 25 p. cent par an pendant la dernière décennie.

Notre pays occupe sur la scène sportive et dans le monde du spectacle une place tout aussi disproportionnée que dans l’économie mondiale. Il est l’une des rares nations jeunes à avoir créé un sport international : le hockey. C’est un Canadien émigré aux États- Unis, le docteur James Naismith, qui a inventé le ballon-panier. Nos athlètes ont récolté 68 médailles d’or aux Jeux olympiques depuis 1920 et une pléthore d’autres titres mondiaux.

Nos artistes et musiciens s’illustrent sur les scènes et les écrans du monde entier. Nos légions d’humoristes et de comiques démentissent la vieille réputation d’éteignoirs qui nous colle à la peau. Aux arts visuels, nous avons donné des créateurs comme Alfred Pellan et Jean-Paul Riopelle, devant lesquels même la critique parisienne s’est inclinée.

Nous avons également fait notre marque dans quantité de domaines mineurs. Peu de nations distillent un whisky aussi apprécié que le nôtre. Plus rares encore sont celles qui peuvent s’enorgueillir de posséder un corps de gendarmerie aussi célèbre que notre Gendarmerie Royale. Si les Américains ne s’intéressent pas beaucoup à leur grand et paisible voisin du nord, ils consomment des quantités effarantes de bière et de bacon made in Canada.

Chose assez normale pour un peuple dont le territoire, bordé par la mer de trois côtés, possède la plus longue frange littorale du monde, les Canadiens se sont particulièrement distingués dans la navigation maritime. Un Néo-Ecossais du nom de Joshua Slocum a fait, en 1898, le premier tour du monde à la voile en solitaire. Onze ans plus tard, le capitaine Joseph-Elzéar Bernier de L’Islet, au Québec, découvrait une série d’îles dans l’océan Arctique et établissait la souveraineté du Canada sur le nouvel archipel. En 1944, le Saint-Roch, un patrouilleur de la G.R.C. commandé par le capitaine Henry Larsen, réalisait la première traversée est- ouest et retour du passage du Nord-Ouest.

Rares sont les Canadiens qui mesurent, même vaguement, l’extraordinaire apport de leur pays au développement des sciences et des techniques. Il peut pourtant revendiquer une kyrielle d’inventions dont le premier moteur marin fonctionnel, le bateau à vapeur, la sirène automatique, le puits de pétrole, le câble sous- marin, le rouleau à peinture et le poste de radio à prise électrique. Le kérosène d’Abraham Gesner, la radiophonie de Reginald Fessenden et la motoneige d’Armand Bombardier sont utilisés d’un pôle à l’autre.

Exemple de la dévolution pacifique du pouvoir aux populations coloniales

C’est un ingénieur canadien, sir Sanford Fleming, qui a imaginé le système des fuseaux horaires. Dans le domaine médical et pharmaceutique, la plus brillante de nos nombreuses contributions demeure l’insuline, découverte dans les années vingt par Frederick Banting et Charles Best et grâce à laquelle le diabète est passé du rang de maladie mortelle à celui d’affection chronique. Banting a d’ailleurs reçu le premier des quatre prix Nobel décernés à ce jour à des chercheurs canadiens pour sa participation à cette découverte capitale.

Les Canadiens se sont montrés aussi novateurs dans le domaine politique que dans celui des sciences. Leur plus grand apport à ce chapitre s’appelle le gouvernement responsable. Mis en oeuvre dans les années 1840 au terme d’un long et âpre combat par les chefs politiques de la province du Canada, Robert Baldwin et Louis- Hippolyte Lafontaine, avec l’appui des Néo-Écossais J. B. Uniacke et Joseph Howe, ce système obligeait le gouverneur britannique de la colonie à respecter la volonté populaire exprimée par une assemblée législative élue dans les domaines de politique intérieure, mais laissait la défense et la diplomatie entre les mains de la métropole. Grâce à quoi, le pouvoir fut dévolu sans violence aux populations coloniales dans une grande partie de l’Empire britannique. Premier Dominion à acquérir sa pleine autonomie, le Canada a ainsi tracé la voie de l’émancipation aux autres possessions impériales.

La Confédération a donné naissance, en même temps qu’à une nation, à une future multinationale : la société du chemin de fer Canadien Pacifique. Ayant accompli l’un des plus grands exploits technologiques de l’histoire en unissant le Canada a mari usque ad mare, comme le prônait la nouvelle devise nationale, elle se lancera dans le transport maritime et aérien, portant les couleurs canadiennes jusqu’à Buenos Aires et Manille. Comme elle, beaucoup d’autres entreprises affrontent aujourd’hui avec brio les porte- étendard des plus anciennes puissances économiques de la planète.

Il ne fait pas la guerre, mais la paix

Le Canada pèse beaucoup plus lourd dans les affaires du monde que ne le laisserait penser sa légèreté démographique. Le prestige inusité dont il jouit, il le tire d’une pratique tout à fait contraire à l’usage immémorial : il ne fait pas la guerre, mais la paix.

Peut-être n’est-il pas le seul pays du monde à avoir fait de la paix un principe constitutionnel à l’égal de l’ordre et du bon gouvernement, mais on n’en connaît pas d’autre dont le monument le plus célèbre soit baptisé la Tour de la Paix. Unique exemple en Amérique continentale d’une émancipation politique sans effusion de sang, la trame tranquille de son histoire n’a été rompue que deux fois par la violence : en 1837 par les rébellions du Haut et du Bas Canada, et en 1885 par celle du Nord-Ouest.

Le Canada a certes collaboré avec les États-Unis et la Grande- Bretagne à la mise au point de l’arme atomique durant la Deuxième Guerre mondiale, construisant l’un des trois premiers réacteurs opérationnels du monde. Mais les recherches qu’il a menées ensuite et qui ont abouti à la création d’une filière nucléaire originale ont toujours eu des fins strictement civiles. Pendant que les chercheurs d’autres pays perfectionnaient la bombe H, ceux du Canada mettaient au point une bombe au cobalt capable d’anéantir… les rumeurs cancéreuses.

Le Canadien en voyage à l’étranger apprend vite que sa nationalité lui ouvre toutes les portes. La réputation extraordinaire dont nous jouissons partout, nous la devons au sang et à l’argent que nos pères ont versés sans compter pour défendre la justice sur tous les continents. Aux pires heures de la Première Guerre mondiale, ils passaient pour les meilleurs soldats du front occidental. Du début du second conflit mondial jusqu’en 1942, notre petit pays d’à peine 14 millions d’âmes a été le principal allié d’une Grande-Bretagne complètement isolée face à l’armée hitlérienne; il a fait une contribution capitale à la bataille de l’Atlantique et à la reconquête de l’Europe. Ces deux guerres lui ont coûté quelque 110 000 hommes.

Le moins imparfait des pays d’une terre imparfaite

Depuis la fin des hostilités, les Canadiens sont à la pointe du combat pour le maintien d’une paix constamment menacée. L’idée d’envoyer sur les points chauds du globe des troupes internationales sous le drapeau onusien vient d’un de leurs diplomates, Lester B. Pearson. Opérant dans les deux langues officielles de leur pays, les soldats canadiens sont passés maîtres dans l’art délicat de s’interposer entre les belligérants. Dans l’exécution de ces missions de paix, ils risquent quotidiennement la mort, la maladie et les blessures. L’aide financière et technique que le Canada accorde aux pays en voie de développement renforce encore son prestige international. Il y consacre une part de son produit national brut nettement supérieure à ce que donnent beaucoup de nations aux économies plus puissantes. Une catastrophe naturelle se produit-elle quelque part ? Aussitôt, une noria d’avions-cargos à l’emblème de la feuille d’érable se met en place pour livrer vivres et médicaments aux populations éprouvées. Les organisations non gouvernementales canadiennes sont en permanence à la pointe du combat humanitaire.

Le Canada peut d’autant mieux faire entendre sa voix dans le concert des nations qu’il est l’un des ténors du Commonwealth et de la Francophonie, l’association des nations de langue française dont le Québec et le Nouveau-Brunswick font également partie. Notre pays exerce en outre une influence considérable au sein de l’O.T.A.N., de l’Organisation des États américains et de l’O.C.D.E.

Il accueille volontiers les réfugiés, suivant en cela une tradition instituée par les Loyalistes pendant la Révolution américaine et perpétuée par les esclaves en fuite, les membres de sectes persécutées par le pouvoir tsariste et les victimes de l’antisémitisme. Au cours des dernières décennies, le Canada a permis à des milliers d’hommes et de femmes chassés d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine par la guerre ou l’oppression de refaire leur vie.

Ces exilés grossissent un puissant flot d’immigrants qui viennent chaque année par centaines de milliers chercher non un refuge, mais une chance de mieux vivre et qui voient dans notre pays quelque chose qui ressemble beaucoup à la Terre promise. A l’époque coloniale déjà, le Canada attirait comme un aimant les masses pauvres et affamées de l’Ancien Monde. Ce sont elles qui ont colonisé les Prairies. Une grande partie du phénoménal essor économique des années cinquante est dû aux trésors d’énergie et d’audace des Européens déracinés par la guerre.

Les immigrants sont devenus les plus ardents défenseurs du Canada sans doute parce que, contrairement aux citoyens de souche, ils ne tiennent pas pour acquis les douceurs de la vie dans notre pays. Beaucoup s’étonnent encore de voir que tout y fonctionne comme prévu : que les autobus partent et arrivent à l’heure, que le téléphone ne soit jamais coupé, que les routes soient larges et bien entretenues, que le robinet d’eau chaude donne toujours de l’eau chaude. Et quel soulagement de n’avoir plus à se défendre contre les épidémies – ou la violence dans les rues !

Les nouveaux venus sont tout aussi stupéfaits par le niveau de vie de la classe moyenne : chez eux, seule l’élite peut s’offrir des vacances à l’étranger l’hiver, un abonnement à un club de golf ou un billet de saison dans une station de ski. Dans la plupart des autres pays, il faut appartenir à la haute société pour posséder une résidence secondaire en lisière d’un plan d’eau et plus encore, une embarcation de plaisance. Pour les immigrants originaires de pays densément peuplés, la nature canadienne, si proche et si bien préservée, est une source constante d’émerveillement.

Tout impressionnants qu’ils soient, ces innombrables avantages matériels ne constituent pas l’essence du miracle canadien. Notre bonheur, nous le devons d’abord à des atouts intangibles comme la civilité et la relative homogénéité de notre société, la fiabilité de notre système judiciaire, la moralité qui empêche la corruption de gangrener le corps politique et de spolier les plus démunis. Nous le devons encore à l’égalité et à la liberté d’action et d’expression qui nous permettent de vivre et d’élever nos enfants dans un climat empreint de tolérance, à l’abri des conflits religieux et raciaux.

Un Canadien moyen répondrait sans doute avec sa coutumière modestie que son pays n’est pas parfait, que l’inégalité, l’injustice, la tension continuent d’y faire des ravages, qu’il éprouve de graves problèmes économiques et politiques, que son existence même est remise en question. On nous permettra de répliquer, en toute objectivité, que s’il n’est pas parfait, il est en tout cas le moins imparfait des pays de la Terre.